Algèbre/Fonctions et applications

Un livre de Wikilivres.

Dans ce chapitre, nous allons commencer par introduire la notion d'application comme une notion primitive, ensuite nous définirons une application comme une relation. Nous nous intéresserons à des types d'application, à des applications particulières et donnerons leurs propriétés.

Applications[modifier | modifier le wikicode]

Définition intuitive d'une application[modifier | modifier le wikicode]


Définitions :

Une application, d'un ensemble E dans un ensemble F (ou de E vers F) est une correspondance, qui à tout élément x de E associe un et un seul élément y de l'ensemble F. y est appelé l'image de x par f et se note f(x).
x est un antécédent de y par f.
E s'appelle l'ensemble de départ ou l'ensemble de définition de f, et F l'ensemble d'arrivée.
L'application f de E dans F se note

ou ou encore

La partie G formée des couples de E × F de la forme (x, f(x)) où x parcourt l'ensemble E s'appelle le graphe de f. Nous avons donc

Une représentation graphique de f est une représentation du graphe de f.

L'ensemble des applications de E dans F se note habituellement ou ou .
Si E=F, l'ensemble des applications de E dans E se note plus simplement ou ou .

Remarques :

  1. Souvent la notion d'application est confondue avec celle de fonction.
  2. L'image d'un élément x par f est aussi appelée la valeur de f en x.
  3. Pour tout x élément de E, f(x) est un élément de F, et ne représente pas l'application f. Il ne faut en aucun cas confondre l'application f, avec l'image par f d'un élément. Ceux qui considèrent que f(x) est une fonction de la variable x, devraient se poser la question suivante:
pour f=exp, si x prend la valeur 2, f(x) est-elle toujours une fonction ?
  1. Si f est une application de E dans F alors nous avons la propriété

Définition (égalité des applications):

Deux applications et sont dites égales si les trois propriétés suivantes sont vérifiées

  1. E=E' (même ensemble de départ)
  2. F=F' (même ensemble d'arrivée)
  3. pour tout x, f(x)=g(x).

Application et relation[modifier | modifier le wikicode]


Définitions :

Un graphe fonctionnel dans est une partie de telle que pour tout , il existe au plus un élément tel que .

Une fonction est un triplet , où est un graphe fonctionnel dans . Si est une fonction, si , on note pour . On dit alors que est un antécédent de par , et que est l'image de par . Une application est une fonction telle que tout admet une image .

Exemples d'applications[modifier | modifier le wikicode]


Définition :

Soit E un ensemble quelconque. L'application identité de E (ou application identique de E) est l'application de E dans E, notée , définie par

.

Définition :

Soient E et F deux ensembles quelconques. Une application f de E dans F est dite constante s'il existe un élément a de F, tel que pour tout x de E, on ait f(x)=a, c'est-à-dire si

.

Exemples :

  • est une application.
  • est une application.

Définition :

Soit A une partie d'un ensemble quelconque E. Nous appelons application caractéristique de A (ou fonction indicatrice de A), l'application de E dans {0, 1} notée ou définie par

.

Prolongements et restrictions[modifier | modifier le wikicode]


À partir d'une application donnée, nous pouvons créer d'autres applications en remplaçant simplement l'ensemble de départ ou d'arrivée par un sous-ensemble ou un sur-ensemble de cet ensemble.

Restriction d'une application[modifier | modifier le wikicode]

Définition :

Soient E et F deux ensembles quelconques et f une application de E dans F. Soit E' une partie de E. Nous appelons la restriction de f à E', l'application g de E' dans F qui à tout x de E' associe f(x) i.e. telle que

Cette application g est habituellement notée .

Exemple :

L'application peut être restreinte à en l'application .

Prolongements d'une application[modifier | modifier le wikicode]

Définition :

Soient E et F deux ensembles quelconques et f une application de E dans F. Soit E' un ensemble contenant E. Nous appelons un prolongement de f à E', toute application g de E' dans F dont la restriction à E est égale à f, i.e. telle que

Remarque :

Il existe en général plusieurs prolongements d'une même application.

Exemples :

  1. Les applications et
    sont des prolongements à [0, 1] de l'application .
  2. sin est un prolongement à de l'application .

Restriction de l'ensemble d'arrivée[modifier | modifier le wikicode]

Soient E et F deux ensembles quelconques et f une application de E dans F. Soit F' une partie de F. Il est possible de restreindre l'ensemble d'arrivée de l'application f, pour former une application g de E dans F' qui à un élément x de E associe f(x), à condition que tout élément x de E ait une image dans F' (i.e. l'image de f soit incluse dans F').
Dans ce cas l'application g se note

Extension de l'ensemble d'arrivée[modifier | modifier le wikicode]

Soient E et F deux ensembles quelconques et f une application de E dans F. Soit F' un ensemble contenant F. Nous pouvons toujours considérer l'application g de E dans F' qui à un élément x de E associe f(x).

Composition des applications[modifier | modifier le wikicode]

Définition :

Soient E, F et G trois ensembles quelconques. Soit f une application de E dans F et g une application de F dans G. La composée de f par g est l'application de E dans G notée qui à tout x de E associe g(f(x)), i.e. l'application définie par

.

Exemple :

Considérons les applications et . Alors les composées de f par g et de g par f sont les applications et .

Exercice :

Soient E et F deux ensembles quelconques et f une application de E dans F. Déterminer

et

Remarque :

En général nous n'avons pas .

Définition :

Soient E un ensemble quelconque, f et g deux applications de . Nous disons que f et g commutent (pour la composition des applications) si .

Remarque :

Soient E un ensemble quelconque, et f une application de . Nous avons

et donc commute avec toute application de .

Proposition (associativité de la loi de composition) :

Soient E, F, G et H quatre ensembles quelconques. Soient , et trois applications. Alors nous avons

.

Démonstration :

et sont bien des applications de E dans H et nous avons

Notation :

Cette application composée de f par g par h, se note simplement .


Définitions :

Soit E un ensemble quelconque.

  1. Soit f une application de . Nous convenons de poser .
  2. Soient , n applications de (). La composée de par , par ..., par notée se définit par récurrence et d'après la proposition précédente, les parenthèses sont inutiles, nous pouvons noter ce produit plus simplement .
  3. Soient f une application de , et . En particulier (pour ), nous obtenons la composée de f par elle-même n fois qui se note . Celle-ci vérifie

Exercice :

On considère l'application . Déterminer pour tout entier naturel n, fn.

Applications injectives, surjectives, bijectives[modifier | modifier le wikicode]

Les types d'applications[modifier | modifier le wikicode]


Définitions :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application.

  • Nous disons que f est une application injective ou est une injection si deux éléments quelconques de E ayant même image par f sont nécessairement égaux, c'est-à-dire
    .
  • Nous disons que f est une application surjective ou est une surjection si tout élément y de F possède au moins un antécédent par f, c'est-à-dire
    .
  • Nous disons que f est une application bijective ou est une bijection si elle est à la fois injective et surjective.

Notations :

Nous notons Inj(E, F), Surj(E, F), Bij(E, F) l'ensemble des injections, surjections, et bijections de E vers F.

Proposition :

Soient E et F deux ensembles quelconques et f une application de E dans F.

  • f est dite injective si et seulement si deux éléments distincts quelconques de E ont des images distinctes, c'est-à-dire

    (contraposée de l'implication de la définition de l'injectivité.)
  • f est injective si et seulement si tout élément y de F possède au plus un antécédent par f.
  • f est injective si et seulement si pour tout élément y de F l'équation d'inconnue x, f(x)=y admet au plus une solution dans E.
  • f est surjective si et seulement si pour tout élément y de F l'équation d'inconnue x, f(x)=y admet au moins une solution dans E.
  • f est bijective si et seulement si tout élément y de F possède un unique antécédent par f, c'est-à-dire
    .
  • f est bijective si et seulement si pour tout élément y de F l'équation d'inconnue x, f(x)=y admet une unique solution dans E.

Propriétés immédiates :

  • La composée de deux applications injectives est injective.
  • La composée de deux applications surjectives est surjective.
  • La composée de deux applications bijectives est bijective.

Proposition :

Soient E, F et G trois ensembles et des applications , .

  • injective implique que f injective.
  • surjective implique que g surjective.

Application réciproque d'une application bijective[modifier | modifier le wikicode]


Définition (application réciproque d'une bijection) :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application bijective.

L'application de F dans E, qui à tout élément de l'ensemble d'arrivée de f, associe son unique antécédent par f se note f-1 et s'appelle l'application réciproque de f.


Théorème :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une bijection. Alors l'application réciproque f-1 de f vérifie

De plus

et

L'application f-1 est bijective et nous avons

(l'application réciproque de f-1 est f)

Démonstration :

...

Remarque :

L'application réciproque d'une application bijective étant aussi bijective, elle est aussi appelée bijection réciproque de f.

Théorème :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application de E dans F. Alors f est bijective si et seulement si il existe une application telle que et . Dans le cas où f est bijective, nous avons g=f-1.

Définition (application involutive) :

Soient E un ensemble quelconque et f dans . f est dite involutive si .

Remarque :

D'après le théorème précédent, f est bijective et nous avons . (f est sa propre bijection réciproque).

Exemples :

  • L'application identité d'un ensemble quelconque est involutive.
  • L'application est involutive.
  • L'application est involutive.
  • Soit E un ensemble quelconque et l'ensemble des parties de E. L'application ( étant le complémentaire de X dans E) est une involution de .
    • L'application est une involution de .

Image directe, image réciproque d'une partie par une application[modifier | modifier le wikicode]

Définition :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application.

Soit A une partie de E, nous appelons image directe de A par f l'ensemble des éléments de F de la forme f(x) où x parcourt A, c'est-à-dire l'ensemble des éléments y de F tels qu'il existe un élément x de A tel que y=f(x). Cette image directe se note f(A), et nous avons

ou .

Dans le cas particulier où A=E, l'ensemble f(E) est l'ensemble des images de tous les éléments de l'ensemble de définition de f, et s'appelle l'ensemble des valeurs de f, ou image de f et se note im f ou im(f).

Propriétés immédiates :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application.

  • (il n'y a pas d'image d'élément de l'ensemble vide puisque l'ensemble vide n'a pas d'élément)
  • Soit x un élément de E. Si A={x}, alors f(A)={f(x)}.

Remarques :

  • L'image directe d'une partie par une application est une partie de l'ensemble d'arrivée et non un élément de cet ensemble.
  • Il ne faut surtout pas confondre l'image directe d'une partie avec l'image d'un élément ou l'image d'une application.

Proposition :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application.
f est surjective si et seulement si f(E)=F.

Définition :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application. Soit B une partie de F, nous appelons image réciproque de la partie B par f, l'ensemble des x de l'ensemble de définition X tels que f(x) appartienne à B, c'est-à-dire l'ensemble de tous les antécédents de tous les éléments de B. Cette image réciproque se note ou parfois (B). Nous avons donc

Remarques :

  • La notation utilisée pour désigner l'image réciproque d'une partie par une application est trompeuse puisque f-1 peut faire penser à l'application réciproque (qui n'existe que dans le cas où f est bijective). En considérant , nous devons donc examiner si Y est une partie de l'ensemble d'arrivée auquel cas il s'agit bien d'une image réciproque, ou si Y est un élément de l'ensemble d'arrivée auquel cas il s'agit de l'image par l'application réciproque de l'élément Y de F, ce qui exige que f soit bijective.
  • Si B se réduit à un seul élément b, alors l'ensemble : s'écrit parfois , mais nous n'utiliserons jamais cet abus.

Propriétés immédiates :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application.

  • , car f est une application et tous les éléments de E ont une image dans F.
  • Pour tout y de F, est l'ensemble de tous les antécédents de y par f.
    Si f est bijective, alors , puisque dans ce cas le seul antécédent de y est .

Propriétés :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application quelconque.

  • (croissance de l'image directe)
  • (croissance de l'image réciproque)

Propositions :

Soient E et F deux ensembles quelconques et une application quelconque.

Familles[modifier | modifier le wikicode]

Étant donné un ensemble E quelconque, nous voulons indicer certains éléments de E, pas forcément avec des entiers naturels comme avec les suites, mais avec les éléments d'un ensemble I d'indices. Nous allons donc définir une famille d'éléments de E comme une application de I dans E, ce qui va permettre d'attribuer à des éléments de E plusieurs indices.

Définition :

Soient E et I deux ensembles. Nous appelons famille d'éléments de E indexée par I, toute application de I dans E. L'ensemble I s'appelle ensemble des indices. Si est une famille, nous notons xi l'image de i par x et cette famille.

Si I est une partie de , alors la famille est une suite.

Si I est un ensemble fini, alors la famille est dite finie.

Si E est remplacé par , alors x est appelée une famille de parties de E.

Remarque :

Attention, une famille n'est pas nécessairement injective, et donc deux indices différents peuvent être attribués à un même élément de E.

Définition :

Soient E un ensemble quelconque et I un ensemble d'indices. Soit A une partie de E, l'injection

est une famille indexée par A et se note généralement . Elle est appelée famille canoniquement associée à la partie A.

Opérations sur les familles[modifier | modifier le wikicode]

Définition :

Soient E un ensemble quelconque et I un ensemble d'indices. Soit une famille de parties de E.

  • Nous appelons réunion de la famille , l'ensemble , noté .
  • Nous appelons intersection de la famille , l'ensemble , noté .

Changement d'indice[modifier | modifier le wikicode]

Proposition :

Soient E un ensemble quelconque et une famille quelconque de parties de E, et soit une application surjective de J sur I. Nous avons

Associativité[modifier | modifier le wikicode]

Proposition :

Soient E un ensemble quelconque et une famille quelconque de parties de E, et soit une famille de parties non vides de I telle que la réunion soit égale à I. Nous avons alors

Distributivité[modifier | modifier le wikicode]

Proposition :

Soient E un ensemble quelconque, une famille quelconques de parties de E et A une partie de E. Nous avons

Distributivité généralisée[modifier | modifier le wikicode]

Proposition :

Soient E un ensemble quelconque, et deux familles quelconques de parties de E. Nous avons

Passage au complémentaire[modifier | modifier le wikicode]

Proposition (lois de Morgan):

Soient E un ensemble quelconque, une famille quelconques de parties de E. Nous avons

Recouvrement, partition[modifier | modifier le wikicode]

Définition (recouvrement d'un ensemble) :

Soit E un ensemble quelconque et une famille quelconque de parties de E. Nous disons que cette famille forme un recouvrement de E si la réunion des parties de la famille est égale à E, c'est-à-dire si

.

Définition (partition d'un ensemble) :

Soit E un ensemble quelconque et une famille quelconque de parties de E. Nous disons que cette famille constitue une partition de E si les propositions suivantes sont vérifiées

  1. aucune des parties n'est vide, c'est-à-dire ,
  2. les parties sont deux à deux disjointes, c'est-à-dire ,
  3. la réunion des parties de la famille est égale à E, c'est-à-dire .

Image directe et image réciproque[modifier | modifier le wikicode]

Proposition :

Soient E et F deux ensembles quelconques, f une application de E dans F, une famille quelconque de parties de E et une famille quelconque de parties de F. Nous avons

Application caractéristique[modifier | modifier le wikicode]

Soient E et F deux ensembles quelconques. Soient f et g deux applications quelconques de E dans F. Dès lors que l'ensemble F est muni d'une addition ou d'une multiplication, il est possible de définir la somme des applications f et g, comme l'application de E dans F, qui à un élément x de E associe f(x)+g(x) et le produit des applications f et g, comme l'application de E dans F qui à un élément x de E associe, f(x).g(x).

Considérons l'ensemble {0, 1} et munissons cet ensemble d'une addition et d'une multiplication définies par

+ 0 1
0 0 1
1 1 0


× 0 1
0 0 0
1 0 1

Définition :

Nous convenons de poser -1=1 et -0=0.
Pour x dans {0, 1}, et pour tout entier relatif n, notons

(|n| désigne la valeur absolue de n)

Proposition :

Soit E un ensemble quelconque, f et g deux applications de et n un entier relatif. Les applications f+g, f.g et n.f définies par

.

appartiennent à .

Théorème :

Soit E un ensemble quelconque. L'application qui à une partie A de E associe l'application caractéristique de A est bijective de dans .

Corollaire :

Deux parties A et B de E sont égales si et seulement si leurs applications caractéristiques sont égales.

Propriétés :

Soient A et B deux parties d'une ensemble quelconque E. Nous avons les égalités suivantes :

  • Si les parties A et B sont disjointes alors

retour à l'algèbre