Introduire la biodiversité dans la construction et l'urbanisme/Biodiversité dans l'environnement bâti : de quoi parlons nous ?/La flore

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En présence de bacs fermés, la flore doit être adaptée à la quantité de terre disponible (et au système de drainage du bac) ; ici il convient de ne pas laisser pousser d'arbres
Un parping spécial contient de la terre qui se couvre ici de mousse
En zone tropicale notamment, une végétation exubérante peut envelopper le bâti et nuire à certaines de ses fonctions ou le dégrader. L'architecte paysagiste et l'écologue peuvent par divers moyens (plantation, gestion) rendre la ville et la nature plus écocompatibles
En ville, chaque poteau téléphonique ou support de luminaire pourrait théoriquement être couvert de lierre et jouer un rôle proche de celui de nombreux arbres, mais le lierre nécessite un entretien important, afin de limite sa croissance en hauteur puis en largeur ; A minima, surtout s'il est constitué de béton, la base d'un poteau peut être facilement végétalisée. Les éventuels excréments et urines d'animaux marquant leur territoire, les pollens, feuilles, mortes, etc s'y décomposeront plus vite

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La végétalisation d'un pont (ici de voie ferrée) peut faciliter le passage de d'une berge à l'autre de certains micromammifères et d'invertébrés fuyant les milieux découverts et artificiels. Le pont devient alors un élément de la trame verte pour lequel un entretien adapté (gestion écologique et donc différentiée) est à prévoir

Hormis dans les jardins et certains patios de pleine-terre, et par rapport à l'écopotentialité naturelle, le nombre de plantes susceptible d'être associées sans risque au bâti lui-même, sans besoin de gestion est relativement limité ; De même pour le nombre de plantes capables de durablement supporter les conditions de vie urbaine, à l'extérieur et plus encore à l'intérieur.

Néanmoins,si cette perspective a été intégré en amont par les aménageurs, urbaniste et architectes, l'installation d'une végétalisation compatible avec le bâti peut être grandement facilitée, et son entretien réduit (pas ou peu de besoin d'arrosage, lieux de compostages prévus in situ ou à proximité, etc.)  ;
Les urbanises peuvent ainsi prévoir une trame verte en surface, accompagnée de fosse de plantations, de poteaux ou éléments assez solides pour supporter les plantes grimpantes, etc.), de réseaux souterrains non vulnérables aux racines.
De son côté, pour les espaces intérieurs, l'architecte peut prévoir quelques volumes (patios, cours, vérandas...) bénéficiant à la fois d'éclairage zénithal et d'un accès à un sol naturel et/ou à l'eau pluviale, etc.). Les plantes doivent être choisies ou sélectionnées pour leur capacité à vivre dans un contexte artificialisé, et implantées dans des lieux où les conditions de sol, climat et lumière leur conviennent. À ces conditions et à celle d'une gestion adaptée, ce nombreux éléments construits ou certaines parties de ces éléments peuvent utilement être végétalisés, avec pas ou peu d'entretien dans le cas de vivaces rustiques.

Un des risques est de dupliquer partout des solutions qui fonctionnent localement. Il est important, ne serait ce que par précaution d'utiliser les ressources naturelles locales et spontanées et de conserver ou restaurer une diversité biologique proche de l'écopotentialité du site, afin notamment de limiter les risques de diffusion de pathogènes ou d'espèces invasives et de bénéficier des services écosystémiques rendus par exemple par les pollinisateurs et autre espèces "auxiliaires".
Pour les mêmes raisons, il est prudent de limiter la pollution lumineuse, par exemple grâce aux détecteurs de présence.

Critères de choix[modifier | modifier le wikicode]

Pour les espaces extérieurs et l'enveloppe du bâti, dans le contexte d'un projet intégrant la biodiversité, les critères de choix sont généralement :

  • le territoire phytogéographique (espèces adaptées au climat général de la zone biogéographique).
    En France les conservatoires botaniques, l'ONF, les Centres régionaux de la propriété forestière peuvent fournir des catalogues floristiques listant ces espèces, par région, département ou parfois par sous-régions) (Exemple : Catalogue floristique régional ou inventaire écologique et géographique des plantes vasculaires de la région Nord Pas de Calais ; Centre Régional de Phytosociologie / Conservatoire Botanique National (CRPF / CBNB), 1986, 225 pages). Ce critère est pondéré par les effets du lieu de plantation, qui dans un environnement bâti peut être surchauffé, anormalement ombré, etc.
  • indigénat (espèce "locale") ;
  • rustiticité et adaptation aux microclimats urbains, voire à la surfréquentation, présence de vélos, chats et chiens, jeux de ballons, etc. ;
  • capacité à grimper et coloniser des supports (ex : lierre, chèvrefeuille...)
  • disponiblité en plants (génétiquement diversifiés et adaptés aux conditions microclimatiques particulières du contexte bâti) ;
  • intérêt esthétique et paysager (qui intervient aussi pour l'agencement des plantes, avec si possible une vision prospective à moyen et long terme, tenant compte par exemple des ombrages et de la croissance des racines, des feuilles mortes, etc. De nombreuses espèces "exotiques" (pour l'Europe) sont souvent choisies parce que jugées ornementales. Sur les substrats épais d'au moins 30 cm on peut aussi trouver des plantes buissonneuses (Abelia, Kerria...) ou grimpantes (Jasmin, Humulus).
  • utilité fonctionnelle (phytoépuration de l'eau, de l'air ou des substrats, décoration, ombrage, entretien d'un microclimat, plante mellifères, etc.).

Un autre critère sera la vulnérabilité des surfaces et matériaux.

Le cas particulier des algues « muricoles »[modifier | modifier le wikicode]

En zone tropicale humide et en saison pluvieuse et sur un matériau ou dans une atmosphère riche en nutriments, un biofilm d'algues (ici algues vertes) peut temporairement proliférer, mais mourra en saison sèche (ici à Calcutta dans le Bengale-Occidental)

Plusieurs espèces d'algues unicellulaires et de cyanophycées se sont adaptées à une vie sur des rochers plus ou moins poreux et/ou toujours humides.

Certains murs ou surfaces de bétons ou mortiers fréquemment humides en climat humide et bien exposés à la lumière peuvent être colonisés par de tels organismes, qui peuvent cependant recouvrir ou colorer le substrat voire légèrement le dégrader (certaines roches ou mortiers très poreux peuvent héberger des microorganismes jusqu'à pluisieurs cm de profondeur). De nombreuses peintures mises sur le marché contiennent des composés biocides (ex : Diuron lixiviable, toxique et économique) visant à tuer ces algues ou les lichens. Des produits hydrofuges sont destinés à empêcher qu'ils se développent dans la couche extérieure d'un mortier, d'un crépi, d'un ciment, d'une céramique ou d'une pierre poreuse. Dans les parties non éclairées mais humides d'un bâtiment, certaines algues et colonies de cyanophycées peuvent se développer sous des lampes ou luminaires.

L'algue Klebsormidium est par exemple fréquemment retrouvée sur des façades en Europe ainsi que d'autres espèces selon Ortega-Calvo et al.(1991)[1] ; Rindi et Guiry (2004)[2] ; Barberousse (2006)[3] et Rindi (2004)[4],[5], dont Trentepohlia, Trebouxia, Prasiola et Chlorella ou encore une espèce du genre Trentepohlia qui est responsable des traînées rougeâtres sur le ciment de poteaux électriques, de murs ou sur le crépi de mortier appliqué sur certaines façades de bâtiments, par exemple assez fréquemment dans l'ouest de la France.

La colonisation de crépis par des bactéries chemo-organotrophiques et/ou les produits de dégradation des cyanobactéries et des algues enrichies en fer provoque une coloration rouge et rose des façades selon Warscheid et Braams (2000)[6], cités par Estelle Dalod dans sa thèse sur l'influence de la composition chimique de mortiers sur leur biodétérioration par les algues[7] ; Et des murs peuvent se teinter de jaune-orangé, brun ou bordeau suite à la présence de caroténoïdes et de produits de dégradation de la chlorophylle (les phycobiliprotéines) issus d’algues, de cyanobactéries et de microchampignons. `

Si le projet de l'architecte était de conserver des murs bien blancs ou "propres", ces organismes lui sont gênant.
Si le projet architectural est de les accepter ou les favoriser, le bâtiment peut être conçu pour les favoriser, tout comme pour les lichens. Il convient toutefois de vérifier leur "acceptabilité" pour le bâti et les occupants. L'écologie et le bilan avantages/inconvénients de ces organismes dans le contexte urbain et architectural demande encore à être approfondie.

  1. Ortega-Calvo J.J, Hernandez-Marine M, Saiz-Jimenez C (1991) Biodeterioration of building materials by cyanobacteria and algae. International Biodeterioration 28, 165–185
  2. Rindi, F., Guiry, M.D., (2004) Composition and spatial variability of terrestrial algal assemblages occuring at the bases of urban walls in Europe. Phycol. 43, 225–235.
  3. Barberousse H (2006) Étude de la diversité des algues et cyanobactéries colonisant les revêtements de façade en France et recherche des facteurs favorisant leur implantation (PhD Thesis). Muséum National d’Histoire Naturelle, Paris
  4. Rindi F, Guiry M.D, (2004, 2008) Composition and spatial variability of terrestrial algal assemblages occuring at the bases of urban walls in Europe. Phycol. 43, 225–235.
  5. Rindi F, Guiry M.D, López-Bautista J.M (2008) Distribution, morphology and phylogeny of Klebsormidium (Klebsormidiales, Charophyceae) in urban environments in Europe. Journal of Phycology 44, 1529–1540
  6. Warscheid T & Braams J, (2000) Biodeterioration of stone : a review. International Biodeterioration & Biodegradation 46, 343–368.
  7. Estelle Dalod (2015) Influence de la composition chimique de mortiers sur leur biodétérioration par les algues. Génie des procédés. Ecole Nationale Supérieure des Mines de Saint-Etienne <NNT : 2015EMSE0777>. <tel-01148160>