« États généraux du multilinguisme dans les outre-mer/Thématiques/Le rôle des langues dans la construction d'une identité commune » : différence entre les versions

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Version du 14 mars 2012 à 10:56

Présentation générale

À travers la langue qu’ils parlent, les hommes et les femmes se situent dans l’histoire, énoncent leurs itinéraires et leurs récits de vie, inventent le présent, et le transmettent aux générations futures par la parole, la poésie, le conte, le chant, la danse, la musique… Il s’agissait ici de réfléchir à la coexistence harmonieuse des langues, à la circulation des idées, au passage d’une langue à l’autre, et de penser le commun comme désir de vivre ensemble, de partager et de transmettre la diversité des richesses d’un territoire.

Atelier : collecter, présenter, partager : pratiques linguistiques et de traduction dans les institutions patrimoniales (musées, archives, bibliothèques)

Modérateur : Michel Alessio (Délégation générale à la langue française et aux langues de France)

Rapporteure : Ghislaine Glasson Deschaumes (Institut des sciences sociales du politique / CNRS)

Résumé

Les constats

Cet atelier s’inscrit dans la suite de l’enquête « Pratiques linguistiques et de traduction dans les institutions patrimoniales d’outre-mer », menée dans le double cadre du groupement d'intérêt scientifique "Institutions patrimoniales et pratiques interculturelles" et des états généraux du multilinguisme, dont les résultats seront formalisés courant janvier 2012.

L’atelier a essentiellement porté sur les pratiques linguistiques dans les institutions patrimoniales, notamment aux stades de la collecte et de la constitution des fonds et collections, de la présentation de l’offre au public, de la prise en compte des acteurs locaux. D’autres volets de l’enquête conduite au cours de l'année 2011 n’ont pu être abordés, faute de temps.

L’atelier a souligné l’urgence de sauvegarder les langues et plus largement les patrimoines des outre-mer, sans insister sur ce point déjà traité dans les états généraux du multilinguisme dans les outre-mer.

Il a également rappelé la nécessité d’envisager le patrimoine dans sa diversité comme une question du présent, et de ne pas le dissocier des enjeux de création artistique.

Les limites

Les dimensions linguistiques et de traduction sont insuffisamment prises en compte dans les musées, centres d’archive et bibliothèques – pour ne pas dire tout à fait marginalisées. Elles ne sont pas nécessairement ignorées par les professionnels eux-mêmes, qui déclarent parfois leur impuissance à développer une approche cohérente en la matière (faute de moyens et de compétences), mais elles le sont en général par les tutelles.

Le constat est fait que les métropolitains s’installant dans les outre-mer font preuve de peu ou pas d’intérêt pour le patrimoine local.

Un certain monolinguisme prédomine dans les musées, centres d'archives, bibliothèques. Avec lui, ce sont des modes de catégorisation des savoirs, de description des réalités, d’indexation des langues, des fonds, des collections, qui prévalent, dont l'inadéquation à l'égard des réalités culturelles locales a été relevée.

La présentation des patrimoines des populations ultramarines est souvent esthétisée, construite de l’extérieur, sans prendre en compte les savoirs de ces populations sur elles-mêmes, ni valoriser le récit qu’elles font d’elles-mêmes.

Les professionnels se trouvent démunis lorsqu’ils veulent prendre en compte la diversité des langues sur un territoire, voire procéder à des processus de traduction : démunis en termes de formation des personnels et en termes de moyens (savoirs, financements).

Les potentiels

Il existe une vrai réflexion des professionnels des musées, bibliothèques, centres d’archives sur la nécessité d’ouvrir leurs institutions à la pluralité des langues, notamment celles parlées sur leur territoire. Des dynamiques positives émergent, notamment dans des coopérations transfrontalières avec la création de réseaux régionaux ne passant donc pas nécessairement par la métropole.

Préconisations

Les participations de l’atelier invitent à agir à différents niveaux :

Au niveau des institutions patrimoniales

  • Il faut placer l’homme, au présent, au cœur des processus patrimoniaux.
  • La prise en compte du multilinguisme est un projet de société. Les institutions patrimoniales en outre-mer ne peuvent ignorer la pluralité des langues parlées sur un territoire, ni les patrimoines qu’elles portent. Elles sont invitées à ouvrir des chantiers et à intégrer ces dimensions dans les projets d’établissement et les projets culturels et scientifiques.
  • Elles sont invitées à utiliser l’ensemble des moyens à leur disposition, qu'ils soient traditionnels ou empruntent aux nouvelles technologies de communication.
  • Les langues au musée, c'est la parole, et pas seulement l’écrit. C’est sous cet angle qu’il faut faire de la langue un objet patrimonial au musée, sans la muséifier et en "l’incarnant".
  • Il faut ouvrir des espaces plurilingues dans les institutions patrimoniales pour donner accès au patrimoine. De tels espaces plurilingues supposent que l'on s'ouvre aux populations locales pour constituer les patrimoines.
  • Parce que l’objet matériel a toujours une langue et qu’il a besoin de la langue pour exister, il importe non seulement de nommer chaque objet dans la langue vernaculaire, mais de procéder à des enquêtes ethnographiques et de faire parler les « histoires de l’objet ». Plus généralement, l’œuvre a une histoire et il faut la faire parler.
  • Les populations locales doivent être associées à l’enrichissement et à la connaissance des collections et fonds, comme au développement de la mémoire collective locale (collecte d’archives orales dans toutes les langues).
  • Le plurilinguisme dans les institutions patrimoniales suppose un effort pour rendre les fonds et collections accessibles aux populations locales, et pas seulement aux touristes.

Au niveau des populations locales, au niveau des citoyens

  • Les habitants d’un territoire sont pleinement légitimes à faire patrimoine et doivent être valorisés comme acteurs des processus de patrimonialisation, pour construire par eux-même le savoir sur eux-mêmes. Détenteurs d’archives, ils ont aussi un rôle de conservation et de transmission.
  • Les métropolitains présents sur un territoire ultramarin sont invités à faire la démarche d’aller vers les langues et patrimoines locaux.

Au niveau des pouvoirs publics / ministère de la culture et de la communication

  • Valoriser davantage les patrimoines des outre-mer et développer dans les formations patrimoniales au niveau national cette dimension ainsi qu’une sensibilisation aux langues des outre-mer;
  • Encourager la prise en compte de la diversité des langues et des patrimoines dans les outre-mer, non pas seulement pour sauvegarder les langues, mais pour faire société;
  • Valoriser les acteurs patrimoniaux locaux dans leur rôle pour constituer des collections de valeur nationale, voire mondiale, à partir d’un ancrage local;
  • Par conséquent, favoriser et soutenir par tous les moyens à disposition la prise en compte des langues, la mise en œuvre de processus de traduction culturelle et linguistique dans les IP, aux niveaux suivants:
         - Collecte et constitution des fonds ;
         - Présentation et accessibilité au public ;
         - Actions de médiation et événements (mais pas discuté en atelier).
  • Adapter les modes de classement et de catégorisation des savoirs aux langues et cultures des outre-mer ;
  • Favoriser et appuyer la mise en réseau des institutions patrimoniales qui souhaitent travailler aux niveaux local, régional (coopérations transfrontalières, coopérations sud-sud, etc) ;
  • Former les personnels détachés en outre-mer pour une meilleure approche et connaissance des territoires.

Au niveau des pouvoirs publics / collectivités territoriales

  • Les collectivités territoriales sont invitées à orienter leurs politiques patrimoniales vers une prise en compte de la diversité des langues et des patrimoines dans les outre-mer, non pas seulement pour sauvegarder les langues, mais pour faire société, pour construire le commun.
  • Il leur faut à cette fin dégager un certain nombre de moyens financiers et humains;
  • Former les fonctionnaires territoriaux œuvrant dans les institutions patrimoniales aux langues locales et aux processus de traduction linguistique et culturelle;
  • Favoriser les mécanismes de participation des populations locales aux processus de patrimonialisation;
  • Favoriser, par conséquent, l’émergence de musées, bibliothèques, centres d’archives plurilingues.


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