La Grande Chasse aux sorcières, du Moyen Âge aux Temps modernes/La Renaissance où s’affrontent magies savante et populaire

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Nouveaux courants de pensée[modifier | modifier le wikicode]

Certains humanistes portent une responsabilité indirecte dans le déclenchement de la Chasse. La Renaissance, en chamboulant les structures de pensée médiévale rationnelle, installe une période désordonnée de magisme et d’intolérance.

La pensée a besoin de se libérer de la scolastique. Quelques humanistes réinventent le platonisme, citons Pic de la Mirandole, Trithième et Paracelse. Cette révolution néoplatonicienne est moins une redécouverte de Platon qu’une réinvention basée sur les détails les plus ésotériques. Ils construisent une magie savante. Pour eux le monde est peuplé de démons qui sont les intermédiaires entre le mage et l’invisible. Il créent une philosophie de la vie et de l’amour. Ils sont en conflit ouvert avec les aristotéliciens et l’Église.

L’Église est exaspérée par ces philosophies nouvelles. Certains ecclésiastiques pensent que ces savants veulent revenir au paganisme. Appuyant l’idée de prédestination, l’astrologie qu’ils utilisent irrite l’Église. Peu à peu, certaines formes d’astrologie sont tolérées, car elles précisent que les astres influencent mais ne régissent pas la vie des hommes. L’existence de ces démons intermédiaires entre les mages et l’invisible fait croire à l’Église qu’elle est dépossédée de son rôle.

Cette magie savante enrichit la sorcellerie de premier type et les nouvelles pratiques sont ensuite compilées et diffusées au travers de « grimoires ». L’Église s’inquiète de voir la magie essaimée dans la population. Notons cependant que les mages servent de paratonnerre ; pendant que l’Église les réprime, elle laisse les sorcières italiennes tranquilles.

L’influence de la Réforme sur la répression[modifier | modifier le wikicode]

La Réforme et la Contre-Réforme laissent de moins en moins de place à la tolérance. Malgré cette volonté de libertés spirituelles et sexuelles, les freins moraux se font de plus en plus nombreux. La Renaissance encourage les sorcières et les réprime ensuite. La Réforme et le durcissement des lois à l’égard des mages-sorciers et des petits maléficieurs font éclore la Grande Chasse. La Réforme appelle notamment à un retour aux textes bibliques et rejette les bulles pontificales comme le Canon Episcopi. La Bible, même si elle n’évoque pas ces questions très longuement, est beaucoup plus dure que le canon. Dorénavant, les protestants condamnent magiciens et sorciers sans pitié. De plus, la Bible exhorte les chrétiens à user de la force pour convertir ou ramener dans le droit chemin les égarés.

Martin Luther, instigateur de la Réforme, ne consacre pas une part importante de son œuvre aux sorcières, mais réaffirme la nécessité de les tuer. Il craint Satan qu’il voit presque partout. Il dit même l’avoir combattu. Diffusant largement la peur du Diable dans ses ouvrages, il attise encore la haine et la suspicion. Les premiers réformateurs installent un climat de sévérité qui est préjudiciable à tous les persécutés (sorcières, malades, homosexuels, prostituées…). Ils veulent restaurer l’ordre perverti.

Les catholiques partagent avec les protestants cette volonté de rétablir l’ordre. Le Concile de Trente témoigne d’une nouvelle disposition mentale des élites. Le Clergé est rappelé à l’ordre et la doctrine catholique est réaffirmée. Le mysticisme catholique n’a jamais été plus marqué qu’entre 1620 et 1640 pendant le pic de la Grande Chasse. Le Concile entend vraiment combattre la magie et la sorcellerie, du moins dans ses formes non catholiques. Cette volonté est toujours réaffirmée dans les conciles suivants. En 1584, le Concile de Bourges affirme que les magiciens doivent être tués et leurs clients exécutes. La Compagnie de Jésus prend le contrôle de l'Inquisition. Le caractère élitiste de la compagnie se traduit par une efficacité accrue des méthodes inquisitoriales.