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Photographie/Personnalités/A/Jonathan Abbou

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Jonathan Abbou est un photographe français, né le 27 décembre 1967. Il a débuté la photographie à Toulouse. Aujourd'hui, il travaille et réside à Paris. Il pratique une photographie plasticienne, sur média argentique traditionnel, dans des domaines de recherche très singuliers.

C'est à Toulouse en 1991 que Jonathan Abbou débute réellement la photographie. Fasciné par le monde étrange révélé par Diane Arbus, il réalise ses premières photographies avec des personnages atypiques. Parallèlement à la prise de vue, il perfectionne la maitrise du tirage ainsi que des procédés alternatifs (virages, colorisation, etc.), ce qui lui permettra d'élargir son champ d'expression à l'intérieur du domaine de l'argentique. En 1996, il s'installe à Paris, où il réalise de nombreuses expositions, notamment la vitrine de la bibliothèque du Centre Beaubourg pour la sortie de son premier ouvrage Érotiques Esquisses qui lui vaudra une excellente critique dans le magazine Artpress. Durant l'année 2000 suivra un deuxième ouvrage, Fiction Urbaine, qui lui vaudra une autre critique d'Artpress et qui lui donnera l'occasion de réaliser une exposition dans le cadre des Rencontres d'Arles en 2001 et à la Maison des Photographes à Paris (UPC) en 2002.

Domaine de recherche

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Jonathan Abbou s'est attribué une expression qui caractérisée l'écrivain naturaliste du tournant XIXe siècle, Émile Zola, (l'idée du réalisme symbolique), pour en transposer l'esprit en photographie. C'est ici un texte court, mais fondateur d'un concept, où Jonathan Abbou explique comment il parvient à faire jouer deux antagonismes de styles artistiques. Le média choisi par l'artiste depuis 20 ans (photographie traditionnelle, argentique, noir et blanc de pratique et expérimentations personnelles) ainsi que l'intervention plastique sur le tirage, permet d'illustrer parfaitement cette transposition analogique d'un concept littéraire du XIXe siècle à une pratique photographique et conceptuelle du XXIe siècle.

Une photographie du réalisme symbolique

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« Comme en littérature nous sommes ici, avec mes photographies, sur deux pôles antagonistes. La description de la réalité sur un versant naturaliste ; telle qu’elle a été vue à la prise de vue, telle qu’elle sera sur le tirage, et la transfiguration symbolique au moyen d’intervention plastique, à travers un parti-pris esthétique ; actuellement, dans mes travaux il s’agit des à-plats acryliques, des taches de sulfure, du choix des teintes lors de la mise en couleurs, etc... Ainsi ma démarche du moment est d’essayer d’allier ces deux formes d’expression, dans une perspective de mise en œuvre où l’harmonie ne pourra se trouver qu'en un équilibre, un réajustement, de ces deux forces d’expressions.

Pour aller plus avant, il est important de faire remarquer le parallèle de cette démarche avec le champ de la linguistique. Dans la photographie, même avec une démarche naturaliste qui consiste à décrire le moment de manière le plus fidèle à la réalité, nous sommes dans la dimension de référenciation à la réalité car une photo, au même titre qu’un mot, n’est pas la réalité vécue, elle en est le témoignage, l’empreinte, la couleur, un signe en référence à la réalité. Comme dans la relation mise en avant par Ferdinand de Saussure (linguiste suisse, 1857-1913), entre le signifiant et le signifié dans leur rapport au signe et à la réalité, la photographie emprunte le même chemin. Elle est le signe qui allie signifiant et signifié, dans une relation de référenciation à la réalité. Nous sommes ici encore dans le domaine du symbolique. Mais cette dimension nous paraît le plus souvent inaperçue, car il s’agit pour le commun, de confondre ce qui est montré (la photo) et ce qui est réelle.

C’est l’autre versant, celui de l’intervention plastique, qui aux yeux du public est mis au rang du symbolique. C’est ce qui est le plus frappant, le premier degré de lecture. Donc puisque dans les deux démarches nous sommes dans le symbolique, comment faire pour trouver un point de rencontre harmonieux, pour qu’aucune des deux formes n’efface l’une ou l’autre ? Comment faire pour que les deux formes ne fassent qu’une ? Hé bien à la manière du courant théorique du Gestalt (W.Köhler, 1920), il s’agit de faire en sorte que la forme soit appréhendée en un bloc. Elle n’est pas l’association additive d’une forme et d’une autre, elle est une réinvention, de quelque chose d’à part, d’une sorte de voix du milieu, le tout étant quelque chose de différent de la somme des parties. Je pars du postulat que les formes perçues dans la photographie et les processus perceptifs mis en route lors de cette perception sont isomorphes, c’est-à-dire que les formes montrées préexistent dans l’esprit du spectateur.

Donc les photos montrées ne sont là que pour révéler des formes virtuellement préexistantes dans notre esprit. Il en est de même pour les sentiments. Une poésie ne vient nous toucher que parce qu’elle nous évoque un sentiment déjà vécu ou fantasmé. Lorsque je me sers de dorures sur mes photographies, celles-ci pour le spectateur, comme pour moi sont perçues comme quelque chosee qui évoque le précieux, et chacun d’entre nous a déjà fait l’expérience du précieux. Ceci m’amène à dire qu’en composant mes tirages je suis moi-même le premier spectateur et je ressens ce qui sera ressenti à des variantes près et selon les singularités. Mais malgré ces variantes, que l’on peut mettre au rang du mystère qui compose toute œuvre, il demeure un noyau perçu immuable de la Chine au Congo. C’est ces noyaux que je tente d’explorer et qui sont la quête de tout mon travail. Au-delà d'une expression profonde, faire de L'Art, c'est pour moi, pouvoir me servir de tous le champ des sciences humaines pour nourrir cette expression. » (Extrait de pensées sur la photographie, J. Abbou, Mai 2007.


Dans le texte ci-dessus, l'accent est mis sur la forme de l'image dans l'intégration entre la « réalité » et la subjectivité plastique de l'artiste. Dans ce deuxième texte Jonathan Abbou nous explique, de façon poétique, comment d'une situation entre deux protagonistes, l'artiste tente de créer une rythmique dans l'image figée. Malgré son caractère subjectif, ce texte n'en demeure pas moins explicite sur l'interaction qui peut exister entre le photographe et son modèle pour parvenir à une dimension dynamique de l'image photographique.

Suspendre l'émotion du modèle

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Comme un cyclope, une créature à œil unique, le photographe observe son modèle. Celui-ci et celui-là cherchent la bonne pose pour se plaire. Lorsque la mesure de la lumière est faite et l’esthétisme des formes partagé, il ne reste plus que l’émotion à suspendre. Quand l’atelier en est quelquefois saturé, les images seront faciles ; le photographe et son modèle ne seront pas fatigués, la séance sera facile. Mais bien souvent, pour le photographe, le challenge est incertain et difficile. La question est alors : comment suspendre cette émotion et comment faire pour qu’elle continue d’exister au-delà du mouvement que la photo fige ? Et ma réponse suit son fil : hé bien, comme une balle que l’on jette en l’air, il se passe un moment où celle-ci reste immobile avant de retomber. Si l'on photographie cette balle à ce moment précis, l'on ne pourra décider ni de l'avant ni de l'après. On aura un instant immobile ou tout peut se jouer.

En photo avec un modèle, on retrouve le même phénomène. L’expression du modèle monte, monte encore, et est suspendue un infime instant avant de retomber. C’est à ce moment que s’opère le shoot. C’est le souffle dans le regard ou la mimique qui jouera l’apesanteur. Le mouvement corporel n’est qu’un apparat esthétique fonction de l’époque, un alibi. La forme aura son heure de gloire, plus tard, quand les temps auront changé, quand le spectateur aura l’émotion d’une époque révolue. Pour l’heure, dans l'atelier ce n’est pas le sujet. Lorsqu’il ne se passe rien, c’est souvent au photographe de provoquer l’instant. Il devra sortir de derrière son œil unique, pour apaiser et faire souffler le modèle qui est plein d’incertitudes. Une brève décontraction bien souvent peut suffire. Néanmoins le malaise du modèle peut aussi être une source d’expression. Le photographe doit faire appel à toute sa concentration et son attention pour ne pas manquer le rendez-vous, qui ne dure souvent qu’une fraction de seconde. Quant au réalisme il est souvent obtenu dans la fixité du regard sur l’objectif. Le personnage acquiert ainsi une réalité commune, une vie, qui facilite l’identification du spectateur. On est au-delà de la simple émotion esthétique pour rentrer dans une dimension psychologique.

  • Érotiques Esquisses .- Paris, Aliénor, 1998, 94 p. (ISBN 2951269102 et 978-2951269101)
  • Fiction Urbaine .- Paris, Aliénor, 2001, 96 p. (ISBN 2951269110 et 978-2951269118)
  • Le petit monde d'Otto [portefolio, préface de Romain Slocombe] .- Paris, Higgins, 2008.
  • Poses lentes [portefolio, préface de Stéphan Lévy-Kuentz] .- Paris, Higgins, 2011.
  • Double Je .- Paris, Higgins, 2013, 88 p.
  • Leporello aux Editions Dumerchez, texte du poète Bernard Noël, signés par Bernard Noël, Bernard Dumerchez et Jonathan Abbou (ouvrage de bibliophilie à 40 ex.), 2015.
  • L'ombre de la terre, poésies de Christine Fizscher, illustrées par Jonathan Abbou, éditions Dumerchez, Paris, 2018, (ISBN 978-2-84791-192-3)
  • 19 HaHa, Texte de Fernando Arrabal, photographies Jonathan Abbou, éditions Dumerchez, Paris, 2018.
  • Onéïros, Photographies et textes de Jonathan Abbou, éditions Dumerchez, Paris, avril 2019, (ISBN 978-2-84791-196-1)
  • Requiem pour un bouffon, Photographies Jonathan Abbou, préface Romain Slocombe, Aphorismes S.E.Otto, éditions Hérézia, Paris, mars 2020, (ISBN 978-2-9572026-0-7)
  • Fables Iconoclastes, Photographies Jonathan Abbou, éditions Hérézia, Paris, avril 2020, (ISBN 978-2-9572026-1-4)
  • La Divine Comédie, Dante Alighieri, L'Enfer, Tome I (Chants de I à XVII), Illustrations photographiques Jonathan Abbou, éditions Hérézia, Paris, février 2023, (ISBN 978-2-9572026-2-1)

Galerie de photographies

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