Cosmologie/L'hypothèse de l'inflation
Les problèmes du modèle LCDM peuvent être résolus par une hypothèse appelée l'inflation cosmologique. Celle-ci postule que l'univers a subi une phase d’expansion avant la recombinaison, avec une vitesse d'expansion supérieure à celle de la lumière. Avec l'inflation, la surface de dernière diffusion correspond à une portion d'espace suffisamment petite pour harmoniser les températures. Cette portion d'espace homogène a subi l'inflation cosmologique, jusqu'à devenir la surface de dernière diffusion. Le tout est illustré dans le schéma ci-contre, qui montre bien que la surface de dernière diffusion correspond à un espace assez grand sans inflation cosmologique, et à un espace bien plus petit avec elle.
Dans cette théorie, l'évolution de l'univers s'est déroulée en plusieurs étapes :
- une étape antérieure à l'inflation, qu'on ne connaît pas très bien ;
- une étape d'inflation exponentielle ;
- une étape où l'univers est dominé par le rayonnement ;
- une étape où l'univers est dominé par la matière.
À l'heure actuelle (début 2016), il n'existe pas de preuve certaine de l'existence d'une inflation. À vrai dire, les scientifiques ne sont même pas certains du déroulement des évènements. On ne sait pas si cette inflation a eu lieu, ni quand. Par quand, on veut dire qu'elle peut avoir eu lieu n'importe quand avant la recombinaison. Dans le cas le plus simple, l'inflation aurait eu lieu avant la phase dominée par le rayonnement, mais il est aussi possible qu'elle ait eu lieu en plein milieu. Dans les faits, on ne peut pas encore discerner ces scénarios avec les observations dont on dispose et la théorie ne nous éclaire pas plus que cela... Au mieux, il s'agit d'une théorie qui fait des prédictions sur certains paramètres du fond diffus, mais ces derniers n'ont pas encore été mesurés. En 2014, la coopération internationale BICEP2 a effectuée des mesures du CMB, espérant trouver des traces de l'inflation dans le CMB, prévues par la théorie. Les résultats étaient initialement favorables et il semblait que l'inflation venait d'être validée scientifiquement, mais des analyses ultérieures ont montré que ce n'était pas le cas. Les analyses statistiques avaient omis divers effets parasites, comme l'influence de la poussière interstellaire/intergalactique et divers autres biais, réduisant les résultats à néant. Reste à voir ce que nous réserve l'avenir !
Le problème de la platitude et l'inflation
[modifier | modifier le wikicode]Cette hypothèse résout le problème de l'horizon, mais aussi le problème de la platitude : la zone a tellement gonflé que les effets de la géométrie de l'univers seraient presque invisibles. Pour faire une analogie, imaginez que la zone gonflée par l'expansion est la surface de la Terre : vous êtes si petits par rapport à la Terre que vous ne vous rendez pas compte de sa rotondité et voyez un sol plat. Pour une explication plus mathématique, il faut recourir à la première équation de Friedmann, que voici :
Vous voyez que dans l'équation précédente, l'effet de la courbure sur l'expansion correspond au terme , où l'intensité de la courbure est modulée par le terme . Plus le facteur d'échelle augmente, plus le terme diminue et moins le terme de courbure a d'effet sur l'expansion. Sans inflation, on s'attend à ce que le facteur d'échelle suive une loi de puissance dont les exposants sont connus. D'abord on a une phase d'expansion dominée par le rayonnement avec un exposant proche de 1/2, qui dure environ 300 000 ans, puis une phase dominée par la matière de près de 13 milliards d'années où l'exposant est de 2/3. Les calculs nous disent que la courbure K devait être particulièrement basse pour coller avec les données observationnelles actuelles connues. Mais si l'inflation a bien eu lieu, a(t) aurait connu une hausse très importante pendant ou avant la phase dominée par le rayonnement, réduisant le terme à presque rien, en accord avec les données observationnelles.
Le mécanisme de l'inflation
[modifier | modifier le wikicode]Le mécanisme supposé pour l'inflation est assez simple à comprendre à partir des équations de Friedmann. À vrai dire, une expansion accélérée s'explique déjà dans ce modèle par la constante cosmologique. Mais en supposant que la constante cosmologique permet d'expliquer l'inflation, on est face à un problème : l'inflation ne s’arrête jamais ! En effet, une constante cosmologique entraîne une expansion exponentielle de l'univers ad vitam æternam, alors que l'inflation a été un phénomène temporaire. La constante cosmologique ne peut donc pas expliquer l'inflation, et il faut trouver autre chose qui se comporte comme une constante cosmologique à un détail près : elle doit varier dans le temps, histoire d'être assez grand lors de la phase d'inflation, et disparaître ensuite.
Au niveau des équations, on peut rendre compte de cela de la même manière que pour la constante cosmologique : en rajoutant une densité d'énergie dans la première équation de Friedmann. Celle-ci s'écrit alors comme suit :
Il suffit juste que augmente pendant la phase d'inflation avant de se réduire à peau de chagrin ensuite et le tour est joué. Reste à inventer le mécanisme d'inflation qui se cache derrière . Et là, les théories sont assez nombreuses ! Il faut dire que n'importe quelle fonction mathématique ad hoc peut fonctionner tant qu'elle a quelques propriétés mathématiques peu contraignantes. La majorité des tentatives se basent sur la présence de ce qu'on appelle un champ scalaire. Un champ scalaire est quelque chose qui attribue un nombre à tout point dans l'espace à chaque instant, appelé le potentiel, noté . De plus, ce champ a une densité d'énergie en chaque point de l'espace, qui dépend du potentiel : celle-ci sera notée . Si on suppose que le champ a la même valeur en tout point, les équations nous donnent la densité d'énergie et la pression associée à ce champ.
La densité d'énergie causée par le champ dépend du potentiel et de sa variation dans le temps (qui est un "équivalent" de l'énergie cinétique pour un champ scalaire). La formule exacte est la suivante :
- , avec .
La pression est de :
On peut alors en déduire , et , qui seront utilisées dans ce qui suit :
Injectons ces équations dans les équations de Friedmann, ce qui donne :
Maintenant, négligeons le terme , supposé bien plus petit que le potentiel et faisons de même pour la dérivée seconde. En clair, on suppose que , hypothèse souvent complémentée avec . Les équations précédentes deviennent ceci :
Les équations précédentes nous disent que l'univers est en expansion pour la première équation, que cette expansion est accélérée pour la seconde, et que le potentiel et la densité d'énergie restent constants malgré l'expansion pour l'équation du fluide. Les trois propriétés sont ce qu'on attend d'un univers dominé par une constante cosmologique, ou par de l'énergie noire de pression négative. Pour résumer, on obtient bien une expansion accélérée dans le cas où , hypothèse souvent complémentée avec .
Précisons cependant que si le potentiel a une valeur nulle, il ne cause aucune expansion : on peut alors modéliser l'inflation en supposant que diminue avec le temps, l'inflation s’arrêtant quand le champ est nul. Tout champ qui respecte ces conditions peut déclencher une inflation, ce qui laisse beaucoup de possibilités. Le champ lié au boson de Higgs est une solution possible, par exemple.