Étymologie de la langue française/Introduction
Les origines du vocabulaire
[modifier | modifier le wikicode]L'essentiel du vocabulaire des langues indo-européennes provient de racines indo-européennes au travers du latin, du germanique ou du grec pour l'Occident, du slave pour l'Est et du nordique pour la Suède et la Norvège.
Pour la langue française, la source principale est le latin, soit par évolution spontanée (langue populaire) soit par construction explicite (langue savante). Par exemple, le mot latin « prisonnier » (captivus) donne chétif dans la langue populaire et captif en langue savante.
Une autre source importante d'un vocabulaire est l'emprunt à d'autres langues au travers, pour l'essentiel, du commerce et des guerres. Pour la langue française, ce furent le francique à l'époque des grandes invasions barbares, l'arabe au Moyen Âge, l'italien à la Renaissance, les langues d'Amérique du Sud lors de la découverte du Nouveau Monde et plus récemment l'anglais. Selon une étude de 1991, environ 13 % des mots (soit 8 000) parmi les 60 000 mots que comporte un dictionnaire usuel, sont d'origine étrangère ; en retirant les mots savants ou archaïques, on obtenait 4 200 mots empruntés sur 35 000, soit 12 %[1]. Sur ces 4 200 mots, 1 053 sont anglais (25 %), 698 italiens (16,6 %), 544 proto-germaniques (13 %), 481 des anciennes langues gallo-romanes (11,4 %), 215 arabes (5,1 %), 164 allemands (3,9 %), 160 proto-celtiques (3,8 %), 159 espagnols (3,8 %), 153 néerlandais (3,6 %), 112 persans et sanskrits (2,6 %), 101 des langues amérindiennes (2,4 %), 89 de diverses langues asiatiques orientales (dont le chinois ou le japonais) (2,1 %), 56 de diverses langues chamito-sémitiques (1,3 %), 55 de langues slaves ou baltes (1,3 %) et 144 d'autres langues diverses (3,4 %).
Langue(s) ou famille de langues | Nombre de mots | Pourcentage de mots parmi les 4 200 | Pourcentage total de mots parmi les 35 000 |
---|---|---|---|
Anglais | 1053 | 25 % | 3 % |
Italien | 698 | 16,6 % | 2 % |
Proto-germanique | 544 | 13 % | 1,55 % |
Langues gallo-romanes | 481 | 11,4 % | 1,37 % |
Arabe | 215 | 5,1 % | 0,6 % |
Allemand | 164 | 3,9 % | 0,47 % |
Proto-celtique | 160 | 3,8 % | 0,46 % |
Espagnol | 159 | 3,8 % | 0,454 % |
Néerlandais | 153 | 3,6 % | 0,437 % |
Persan et sanskrit | 112 | 2,6 % | 0,32 % |
Langues amérindiennes | 101 | 2,4 % | 0,29 % |
Diverses langues asiatiques orientales | 89 | 2,1 % | 0,254 % |
Diverses langues chamito-sémitiques | 56 | 1,3 % | 0,16 % |
Langues slaves ou baltes | 55 | 1,3 % | 0,157 |
Autres langues diverses | 144 | 3,4 % | 0,41 % |
L'anglais a aussi beaucoup emprunté à la langue française au Moyen Âge. En effet, après sa victoire, Guillaume le Conquérant impose le normand comme langue de la cour – qui évolue en français anglo-normand – entraînant de nombreux emprunts. Ces emprunts doublonnent souvent avec des mots de radical germanique : le peuple emploie le mot d'origine germanique alors que les nobles utilisent le terme français. Par exemple, de nos jours encore, on différencie ox (d'origine germanique), le bœuf élevé par les paysans, et beef (de l'ancien français buef, aujourd'hui bœuf), ce même animal dans les plats de la noblesse. Quant au tunnel, il s'agit du mot d'ancien français tonnelle, emprunté par les Anglais puis restitué avec un autre sens lors de l'apparition du chemin de fer. Avant le chemin de fer, il y avait déjà des tunnels en France, mais on les appelait galeries, mot conservé en italien moderne (galleria).
Les autres sources notables sont l'emploi de noms propres comme noms communs (poubelle, barème, etc.), de sigles (laser, sida, radar, etc.), d'onomatopées (boum, croasser, etc.).
Enfin, quelques mots constituent des créations tout à fait conscientes et circonstanciées (ordinateur, bikini, monokini, etc.).
L'évolution et la disparition des mots
[modifier | modifier le wikicode]Dans une langue vivante, les mots peuvent évoluer :
- de façon interne par préfixation (courir → accourir) ou dérivation
- de façon historique au fur et à mesure que la chose désignée évolue elle-même (de nos jours un pantalon ou une culotte n'ont plus grand-chose à voir avec les premiers pantalons ou les sans-culottes de la période révolutionnaire française)
- de façon sémantique par analogie de forme, de couleur, de matière ou par application d'autres procédés voisins des figures de la rhétorique (le tout pour la partie, par exemple).
Enfin, les mots disparaissent lorsque le signifié (l'objet, l'action, le sentiment désigné par un mot) disparait (par exemple miniteler, qui signifiait « communiquer avec un minitel »), quand ils ne sont plus compris ou sous l'évolution de la sensibilité sociale.
Au Moyen Âge, la fauconnerie (le dressage et l'emploi des faucons pour la chasse) constituait une haute technologie et son vocabulaire s'est répandu dans le langage courant. Au XIXe siècle, le cheval était un « instrument » économique et social de base et le vocabulaire de l'équitation était compris de tous ; il est aujourd'hui remplacé par celui de l'automobile.
L'expression sans solution de continuité, de plus en plus mal comprise et parfois pour le contraire de ce qu'elle veut dire, est ainsi en voie de disparition au profit de sans arrêt ou 24/24 h - 7/7 j etc, selon le contexte. Il soulait (« il avait l'habitude ») ou peu m'en chaut (« peu m'importe ») ont de nos jours quasiment disparu.
Nègre, qui a appartenu au vocabulaire standard bien au-delà de la Seconde Guerre mondiale, n'est plus en usage aujourd'hui, si ce n'est pour désigner la personne qui a écrit un livre à la place de celle qui le signe comme auteur.
Ces disparitions sont lentes. L'adjectif débonnaire reste un témoin de la fauconnerie. Sans pratiquer l'équitation, on comprend encore ce que signifie avoir des œillères.
Plan
[modifier | modifier le wikicode]L'exposé suit l'enchaînement ébauché ci-dessus (origines - extension - évolution et disparition du vocabulaire) puis l'illustre par le commentaire étymologique d'un message fictif.
Références
[modifier | modifier le wikicode]- ↑ Jacques Mousseau, « Le roman de la langue française : Henriette Walter. L'aventure des mots venus d'ailleurs », dans Communication & langages, vol. 114, no 1, 1997, p. 125 [texte intégral].