Apprendre la guitare/Apprendre le manche

Ce chapitre propose différentes approches, suggestions et exercices pour l'apprentissage du manche : mini-grilles mobiles, grilles de position, grilles globales, grilles de fonctions. Il peut être lu avant ou parallèlement à l'étude des chapitres suivants :

L'ordre d'étude des différentes manières de voir le manche envisagées n'a aucune raison d'être linéaire - ces points de vue sont en fait complémentaires. L'assimilation de ce matériel demande du temps : plusieurs mois, voire plusieurs années. Tous ces éléments sont importants, mais ne sont qu'un point de départ. Le but réel du travail de ces grilles, motifs, repères, etc., est de parvenir à les oublier, en laissant vos mains se déplacer naturellement sur la ou les notes que vous souhaitez entendre.

Repères, grilles, motifs

Les cordes de la guitare sont accordées, de la plus grave à la plus aiguë, Mi, La, Ré, Sol, Si, Mi, soit une distance de 5 demi-tons (5 cases, une quarte juste) entre les cordes Mi et La, La et Ré, Ré et Sol, Si et Mi, mais une distance de seulement 4 demi-tons (4 cases, une tierce majeure) entre les cordes Sol et Si.

Une partie de la difficulté de l'apprentissage de l'instrument est due à cette irrégularité d'intervalle entre ces deux cordes. Ce choix d'accordage permet de rendre jouables un grand nombre d'accords qui ne pourraient pas l'être autrement, mais multiplie le nombre de grilles élémentaires nécessaires pour jouer une même gamme ou un même accord sur toute l'étendue du manche. Un motif joué sur les quatre cordes inférieures ne pourra être transposé aux quatre cordes supérieures sans compenser cette distance moindre entre les cordes Sol et Si, en remontant d'un demi-ton la partie du motif jouée sur les cordes supérieures :

Les notes d'une même tonalité s'inscrivent quant à elle dans une grille globale couvrant l'ensemble du manche, dont l'apprentissage peut être décomposé en celui d'un ensemble de grilles locales, une pour chaque position, c'est-à-dire chaque hauteur possible de la main gauche. Toutes ces grilles locales ne sont pas également confortables ou faciles à retenir, et il est assez tentant d'en privilégier certaines, voire seulement une ou deux dans lesquelles on dispose de repères sûrs. Cette limitation peut cependant poser problème : le choix des notes sur une unique grille de position est inévitablement conditionné en partie par sa forme, et un jeu réduit à cette seule grille risque de s'enfermer dans les mêmes clichés.

Les approches présentées ci-dessous peuvent servir plusieurs objectifs complémentaires, dont celui de briser cette relative paralysie de la main gauche, et d'atteindre le point ou celle-ci pourra se déplacer librement sur toute l'étendue du manche en convertissant en mouvements le fil de la pensée musicale sans réflexion consciente. Un objectif parallèle pourra être de parvenir à visualiser naturellement le nom d'une ou plusieurs notes jouées sur une partie du manche, leurs positions sur les autres parties du manche (à l'octave près ou non), la fonction de ces notes dans une tonalité donnée ou dans l'accord courant - inversement, de retrouver la position d'une ou plusieurs notes dans n'importe quelle partie du manche à partir de leurs noms ou de leurs fonctions. Les grilles présentées fournissent d'autre part un matériau musical brut pour la construction d'accords ou de canevas d'improvisation facilement explorable à l'aide de simples diagrammes, en préparation de l'improvisation ou de la composition réelles - dans lesquelles, au final, ces repères perdront leur sens et ou seul comptera, à un instant donné, ce que le guitariste souhaitera entendre.

Suggestions d'exercices

Les exercices suivants pourront vous être utiles. N'hésitez pas à en chercher des variantes et à les ajouter à cette liste.

Exercice 1

Un bon moyen d'assimiler les grilles (globales ou locales) présentées dans ce wikilivre consiste à les imprimer, éventuellement à les agrandir en format A3, et à jouer en regardant ces grilles plutôt que le manche. Un moyen encore plus efficace d'assimiler ces grilles, en particulier les grilles globales, consiste à les travailler sans guitare, simplement en les regardant et en imaginant le son de notes jouées à un emplacement ou un autre - votre instrument peut à tout moment vous permettre de vérifier la hauteur des notes entendues mentalement. Ce travail permet à la fois de mémoriser ces grilles et de développer son oreille intérieure. Il peut être poussé jusqu'au point où l'ensemble du manche est visualisable mentalement, et surtout virtuellement jouable, sans instrument ni diagrammes.

Exercice 2

Si une approche très systématique du jeu en position vous convient, choisissez une tonalité et une grille. Pendant toute une semaine, jouez sur cette grille et seulement sur cette grille, aussi bien en solo qu'en accords - tous les degrés de la tonalité choisie ont au moins une forme possible dans cette grille, éventuellement réduite à 3 ou 4 notes, sans quinte, ou enrichie. Gardez en tête le nom de chaque accord joué. Au bout d'une semaine, passez, dans la même tonalité, à la grille adjacente. Il vous faudra sept semaines pour étudier toutes les grilles de la tonalité choisie, soit plus d'un mois et demi, mais cet investissement a de bonnes chances d'être définitif.

Exercice 3

L'exercice suivant est destiné à l'assimilation d'une grille. Choisissez une tonalité, une grille et une position. Trouvez mentalement une suite de quelques notes dans la tonalité choisie et dans la tessiture de la grille. Jouez cette suite sans changer de position. Recommencez avec une autre suite de notes, sans changer de tonalité ni de position.

Exercice 4

L'exercice suivant est destiné à travailler la connexion entre les grilles. Choisissez une tonalité, une suite de quelques notes, et placez-vous à la position 0. Jouez cette suite à toutes les octaves possibles sans changer de position. Montez à la position 1, et recommencez. Montez à la position 2, et recommencez, etc.

Exercice 5

Cet exercice, plutôt difficile, est destiné à vous faire travailler le jeu dans toutes les tonalités à une position donnée. Choisissez une tonalité, une suite de quelques notes (par exemple un simple accord arpégé), et une position. Jouez cette suite à toutes les octaves possibles, sans changer de position. Jouez cette suite transposée d'un demi-ton vers le haut, à toutes les octaves possibles, toujours sans changer de position. Transposez-la encore d'un demi-ton et recommencez, toujours à la même position, etc. À chaque étape, gardez en tête la tonalité courante, le nom de la forme employée et son doigté (inférieur ou supérieur). Une fois les douze tonalités couvertes, recommencez en transposant cette fois à chaque étape la suite de notes d'un demi-ton vers le bas.

Voir aussi