Planétologie/L'intérieur des planètes et satellites

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Toutes les planètes ont une composition chimique similaire. La composition chimique totale des planètes telluriques est dominée par le Fer, le Magnésium, le Silicium et l'Oxygène : 95% de la masse des planètes telluriques est composé par les quatre éléments précédents. Les autres éléments, tels le Calcium, l'Aluminium, le Nickel et le Soufre se partagent 4,99% du reste, le 0.01% restant étant composé d’éléments trace. Les planètes gazeuses ont une composition plus enrichie en éléments volatiles, comme de l'hydrogène ou de l'hélium. Cependant, ces éléments ne sont pas répartis de manière homogène à l'intérieur des planètes.

Si certains petits satellites sont relativement homogènes, les gros corps sont structurés en plusieurs couches de composition différentes. Ces couches se distinguent par une composition chimique spécifique, parfois par des propriétés physiques distinctes. La structure interne des planètes provient d'un mécanisme de différenciation qui commence dès leur formation. Toutes les planètes ont été dans un état fluide suite à leur formation. Par exemple, les planètes telluriques ont été intégralement fondues peu après leur formation, il y a 4,5 milliards d'années. Les planètes gazeuses sont quant à elle fluides, car gazeuses. Dans cet océan de magma ou de gaz, les éléments chimiques se sont répartis à des profondeurs différentes en fonction de leur densité. Une première cause de cette différenciation est la densité : les éléments denses et lourds sont tombés, alors que les éléments légers ont flotté à la surface. Sur les planètes gazeuses, il est évident que les gaz sont restés en surface de la planète tellurique. Mais le cas des planètes telluriques est clairement le plus intéressant.

Earth Differentiation

La structure interne des planètes telluriques[modifier | modifier le wikicode]

Planète tellurique : manteau silicaté, noyau métallique.

Les planètes telluriques du système solaire sont composées d'un noyau central métallique surmonté d'une ou de plusieurs couches silicatées. Mercure, la Terre, Venus et Mars sont toutes de ce type. Leur intérieur est composé d'au moins trois grandes couches concentriques, aux compositions chimiques et propriétés physiques différentes : une croûte silicaté, un manteau silicaté et un noyau métallique. Seule la taille respective de ces couches change selon la planète, ainsi que quelques paramètres géochimiques assez spécifiques.

Structure interne des planètes telluriques du système solaire.
Planète océan : une couche d'eau ou de glaces surmonte un cœur silicaté.

Les satellites telluriques sont différents des planètes telluriques. Ils se sont formés dans le système solaire externe, riche en volatils (glaces et silicates), mais pauvre en métaux réfractaires. La pauvreté en métal de cette zone fait que les satellites n'ont pas de noyau métallique central avéré, bien qu'il soit possible qu'ils aient un petit noyau assez peu volumineux. De plus, la richesse en glaces et en eau fait que ces satellites sont recouverts d'une couche d'eau. Celle-ci est supposée en grande partie solide, bien qu'une partie puisse être liquide. L'eau liquide serait coincée entre des couches de glaces. Quoi qu’il en soit, ces planètes/satellites sont appelées des planètes océans, en rapport à leur richesse en eau (solide ou liquide).

Il existerait, hors du système solaire, des planètes telluriques qui seraient organisées autrement. Certains supposent l'existence de planètes sans noyau métallique interne, appelées planètes de silicates. D'autres postulent des planètes intégralement métalliques et sans couche mantellique silicatée, appelées planètes métalliques. D'autres supposent des planètes similaires aux planètes de silicates, mais où le manteau serait riche en carbone, donnant un manteau composé de carbure de silicium et non d'oxyde de silicium. Il va de soi que ces trois derniers types sont purement hypothétiques.

Planète sans noyau : manteau de silice (silicium + oxygène), pas de noyau.
Planète métallique : Pas de manteau, noyau métallique en Fer, Nickel et Soufre.
Planète de carbone : manteau de carbure de silicium (silicium + carbone), noyau métallique.

La composition chimique et minéralogique des couches[modifier | modifier le wikicode]

Structure interne des planètes telluriques.

Le noyau ferreux central est composé essentiellement de Fer, couplé à des éléments lourds encore mal connus. On suppose que le Nickel et le Soufre seraient les composants secondaires les plus importants. Des quantités non-négligeables de Silicium ou d'Oxygène seraient présentes dans le noyau, sous la forme de minéraux ferreux. Ce noyau est totalement fondu lors de sa formation, mais son refroidissement fait qu'il se solidifie progressivement. Sur Terre, cette solidification n'est pas terminée, ce qui fait que le noyau est composé d'une graine solide centrale et d'un noyau externe liquide. Le noyau des autres planètes est mal connu, certains indices laissant penser à des noyaux partiellement liquide, alors que les calculs théoriques donnent des noyaux totalement solides. Le mystère est encore loin d'être clos.

Le manteau lui, est totalement solide quel que soit la planète. Il est composé de silicates riches en Fer et en Magnésium. Il est composé d'une roche appelée la péridotite, ses minéraux principaux sont l'olivine, l'enstatite, la pérovskite et la magnésowüstite, secondés par quelques minéraux silicatés similaires. Il est plus dense que la croute, composée soit de basalte soit de granites. Les croutes des planètes telluriques sont surtout composées de roches appelées basaltes ou d'anorthites. Elles sont semblables à la croute océanique terrestre. La Terre possède aussi une croute continentale fortement granitique, sans équivalent dans le système solaire, la Terre étant la seule à avoir une tectonique des plaques.

La différentiation planétaire[modifier | modifier le wikicode]

Prenons une planète tellurique usuelle, avec une croute, un manteau et un noyau. Cette structuration en trois couches prend naissance après la formation des planètes, quand celles-ci étaient toutes fondues. Dans cet océan de magma, le Fer et d'autres éléments métalliques lourds sont tombés vers le centre de la planète, alors que les silicates plus légers sont restés dans les couches supérieures. Les métaux se sont concentrés au centre, donnant un noyau métallique, alors que les silicates ont donné un manteau solide. Certains matériaux très légers ont surnagé à la surface du magma, donnant naissance à une croûte solide.

Outre la densité, certains éléments chimiques forment plus facilement des liaisons avec le silicium, d'autres avec le fer, d'autres encore avec l'oxygène, etc. Les éléments qui ont une affinité avec le silicium ont tendance à rester dans les couches supérieures, alors que ceux qui aiment le fer tombent avec lui. Par exemple, l'uranium et divers autres éléments radioactifs ont tendance à se lier avec les silicates : on les retrouve donc dans la croûte et notamment dans la croûte continentale.

Le noyau central s'est formé progressivement par la chute du fer et du nickel au centre de la Terre. À l'heure actuelle, le modèle en vigueur dit que le fer et le nickel se sont combinés entre eux pour former divers composés chimiques. Ces composés insolubles dans le magma de silicates fondus ont formé des gouttes de métal qui sont lentement tombées au centre de la planète. Par la suite, le noyau a progressivement refroidi. Il faut dire que les matériaux radioactifs ne se lient pas facilement au fer et au nickel. En conséquence, ceux-ci restent dans le manteau. Le noyau n'étant pas chauffé de l'intérieur par manque de combustible nucléaire, ses couches internes refroidissent progressivement. Les parties internes du noyau se solidifient en premier, ce qui fait que le noyau se solidifie de l'intérieur. Pour les autres planètes que la Terre, ce processus a totalement solidifié le noyau : les noyaux de Mercure, Vénus et Mars sont totalement solides. Dans le cas de la Terre, ce refroidissement n'a pas encore solidifié tout le noyau, ce qui fait qu'il est composé de deux couches : un noyau externe liquide, et un noyau interne solide.

La chaleur interne des planètes telluriques[modifier | modifier le wikicode]

La chaleur qui a fait fondre les planètes telluriques a diverses origines. Premièrement, toutes les planètes telluriques contiennent des éléments radioactifs dont la désintégration produit de la chaleur. Ce mécanisme se poursuit à l'heure actuelle dans la majorité des planètes telluriques, mais il a été nettement plus important lors de leur formation : les éléments radioactifs étaient alors plus nombreux, leur nombre a diminué progressivement à la suite des désintégrations. Deuxièmement, les planétésimaux qui se sont crashés sur ces planètes ont fourni une partie de la chaleur : l'énergie cinétique des météorites se transforme en chaleur lors de l'impact. La différenciation de la planète a aussi libéré de la chaleur, qui provient de la transformation calorique de l'énergie potentielle lors de la chute des métaux au centre de la Terre. Vu qu'au début du système solaire, ces impacts étaient nombreux, ils étaient suffisants pour faire fondre une portion des planètes telluriques. On voit donc qu'il existe deux sources principales de chaleur : une chaleur radioactive et une chaleur originelle. À ces deux sources de chaleur, il faut ajouter, sur certaines planètes, la cristallisation du noyau central qui libère de la chaleur latente.

La production de chaleur[modifier | modifier le wikicode]

Ce diagramme montre l'évolution de la production de chaleur à l'intérieur de la Terre selon son âge. On voit bien que la production de chaleur a fortement diminué, en corrélation avec la baisse des radionucléides restants.

La production de chaleur a commencé dans les planétésimaux, permettant à ceux de grande taille de fondre et de se différencier, avant de se poursuivre à l'intérieur des planètes telluriques. Pour les petites planètes, comme Mercure, cette création de chaleur a rapidement cessé par manque de combustible radioactif. La planète s'est alors rapidement refroidie, sans vraiment engendrer de volcanisme important. En se refroidissant, Mercure s'est même contractée, donnant naissance à des failles et plis de contraction à sa surface. Sur les autres planètes, leur grande taille fait qu'elles avaient un gros stock de radionucléides originels, permettant de produire de la chaleur sur de longues périodes de temps. C'est pour cela que les planètes telluriques suffisamment massives, comme Vénus ou la Terre, sont encore suffisamment chaudes pour avoir un volcanisme à l'heure actuelle.

Les processus de transfert thermique[modifier | modifier le wikicode]

La production de chaleur entraîne des phénomènes variés, qui vont du volcanisme à la tectonique des plaques terrestres. La chaleur produite au cœur d'une planète doit être dissipée d'une manière ou d'une autre. À ce petit jeu, la croûte solide sur laquelle repose le manteau fait office de couvercle qui limite l'évacuation de la chaleur. La dissipation de la chaleur demande que celle-ci traverse la croûte, ce qui implique fatalement des processus volcaniques ou une conduction à travers la croûte. En outre, la chaleur se déplace à l'intérieur de la planète par conduction et convection, la convection étant le mécanisme principal. La convection est surtout localisée dans le manteau, qui est parcouru de cellules de convection sur les planètes encore chaudes. Cela provient du fait que la production de chaleur radioactive est très faible dans le noyau : celui-ci contient trop peu d’éléments radioactifs, ceux-ci ayant des affinités chimiques faibles avec le fer du noyau. L’essentiel des radionucléides se trouve dans le manteau et la croûte, vu que l'uranium a beaucoup d'affinités chimiques avec les silicates. En conséquence, la majorité de la chaleur radioactive est produite dans le manteau et la croûte, ce qui rend la convection plus efficace.

Heat flow of the inner earth

La structure interne des planètes gazeuses[modifier | modifier le wikicode]

Les planètes gazeuses sont formées avant tout de gaz, mais attention : il ne s'agit pas de boules de gaz, sans la moindre trace de matière rocheuse. On devrait plutôt les voir comme une sorte d'enveloppe de gaz qui entoure un corps rocheux certainement sphérique. Une seconde interprétation est de considérer que ces planètes sont en réalité des planètes telluriques avec une atmosphère deux à trois fois plus épaisses que le corps rocheux, l'atmosphère faisant partie de la planète proprement dite.

La classification des planètes géantes[modifier | modifier le wikicode]

Toutes les planètes gazeuses n'ont pas la même structure interne, selon leur distance de formation au Soleil. Quelques subtilités se font notamment jour quand on se demande quel est le corps tellurique entouré par l'atmosphère : est-ce une planète silicatée ou une planète océan ? Les deux sont possibles, et donnent respectivement des géantes gazeuses et des géantes de glaces. Typiquement, les astronomes distinguent plusieurs types de planètes gazeuses : les géantes gazeuses et les géantes de glace. Les premières contiennent un corps purement tellurique, alors que les secondes contiennent une planète océan. Ces deux types sont eux-mêmes divisés en deux sous-types chacun, selon l'épaisseur de l'atmosphère. On distingue donc :

  • les géantes gazeuses, des planètes composées d'une enveloppe de gaz entourant un corps rocheux ;
    • les planètes purement gazeuses, avec une enveloppe de gaz qui entoure un corps rocheux sphérique très petit ;
    • les planètes gazeuses à noyau massif, identiques aux précédentes, si ce n'est que le noyau est beaucoup plus grand ;
  • les géantes de glace, des planètes composées où un corps rocheux est enveloppé d'une couche de glaces et d'eau, elle-même entourée par une atmosphère gazeuse ;
    • les planètes joviennes, où la couche de glaces et d'eau est très mince par rapport à l’atmosphère ;
    • les planètes neptuniennes, où la couche de glaces et d'eau a une épaisseur particulièrement importante.

Les géantes gazeuses sont absentes du système solaire, mais existent hors du système solaire : certaines exoplanètes pourraient correspondre à ces caractéristiques. Par contre, les types de planètes « joviennes » et « neptuniennes » sont inspirés de leurs représentants du système solaire : Jupiter et Saturne sont des planètes joviennes, tandis que Neptune et Uranus sont des planètes neptuniennes. D'où le nom donné à ces types : jovien est l'adjectif qui se réfère à Jupiter, de même que neptunien se réfère à Neptune. Cela se voit sur les coupes-section supposées de ces planètes. Le schéma suivant montre que Jupiter est Saturne sont intégralement composées d'une couche d'hydrogène, qu'il s'agisse d'hydrogène normal ou d'hydrogène métallique (gazeux, mais conducteur d'électricité). Par contre, Neptune et Uranus ont une atmosphère composée d'hydrogène et d'hélium, surmontant une couche de glaces d'eau, d'ammoniac et de méthane.

Intérieur des planètes gazeuses du système solaire

L'état du gaz dans les planètes géantes[modifier | modifier le wikicode]

Les planètes géantes sont surtout composées d'hydrogène et d'hélium. On sait qu'ils sont sous forme gazeuse en surface, mais c'est plus compliqué pour ce qui est des profondeurs. Entre la surface et les profondeurs des géantes, les conditions de température et de pression ne sont pas les mêmes. La température n'est que de quelques centaines de kelvins à la surface, mais peut atteindre plusieurs milliers de degrés dans les couches les plus basses. Et c'est la même chose pour la pression : de très faible en surface, elle devient très importante en profondeur. Elle peut atteindre 20 à 80 Mbar dans les profondeurs de planètes comme Jupiter et Saturne.

Jupiter - Coupe intérieure

Sous l'effet de la pression, les gaz se compressent et leurs molécules/atomes se rapprochent fortement, mais les fortes températures les empêchent de se liquéfier complètement. Le résultat est un fluide composé d'hydrogène et d'hélium assez dense. Le fait que les molécules/atomes soit si rapprochés, tout en restant un fluide, a des conséquences quand la température et la pression sont assez fortes. À une température de plus de 2 000 K et une pression de plus de 1.4 Mbar, l'hydrogène devient métallique. Par métallique, on veut dire que les électrons dans le gaz se comportent comme des électrons dans un métal. L'hydrogène devient conducteur du courant électrique, il acquiert des propriétés magnétiques, etc. Il devient même supraconducteur. La même chose pourrait survenir pour l'hélium, mais il faudrait pour cela des pressions qu'on ne rencontre dans aucune planète géante. La pression et la température ne sont pas assez fortes à l'intérieur des géantes pour cela. L'intérieur profond des planètes est donc composé de gaz très dense, aux propriétés parfois déconcertantes.

Précisons que l'hélium est un gaz plus lourd que l'hydrogène, ce qui fait que sa densité est supérieure. L'hélium coule, alors que l’hydrogène surnage. On s'attend donc à ce qu'il se produise une différentiation planétaire dans les planètes géantes. Mais on ne sait pas exactement si la séparation est parfaite ou si l'hydrogène et l'hélium restent mélangés sur toute la profondeur des géantes. Apparemment, l'hélium et l'hydrogène restent mélangés dans les géantes. On n'aurait pas de séparation entre une couche d'hélium en profondeur et une couche d’hydrogène en surface. On aurait une couche d'hydrogène/hélium, qui serait assez bien mélangée par des processus convectifs. Mais le mélange ne serait pas parfait et le rapport hélium/hydrogène augmenterait avec la profondeur.

En combinant les deux paragraphes précédents, on peut deviner à quoi ressemble l'intérieur d'une planète géante. Le cœur des planètes géantes est donc composé d'une planète tellurique, surmonté par une couche de glaces, elle-même surmontée par une couche riche en hélium et en hydrogène métallique, suivi par une couche d’hydrogène non-métallique. Cela décrit bien l'intérieur des planètes Jupiter et Saturne, mais cela ne colle pas pour Uranus et Neptune. En effet, la couche d’hydrogène métallique n’existe pas sur ces deux planètes. Elles sont trop petites, ce qui fait que la pression en leur sein n'est pas assez grande pour que l'hydrogène devienne métallique.