Affaire Priore/Les problèmes « humains » de l'Affaire

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Les problèmes « humains » de l'Affaire Priore



Introduction[modifier | modifier le wikicode]

Wikipédia propose un article sur : « Affaire Priore ».

Au cours des chapitres précédentes nous avons décrit les aspects historiques et scientifiques de l’affaire Priore :

  • L'histoire de l'affaire Priore
  • les composants principaux des appareils et le rayonnement électromagnétique émis,
  • les grandes lignes de l’expérimentation biologique qui a été réalisée.

La conclusion à laquelle nous sommes parvenus est que ce rayonnement, très particulier, avait des effets biologiques importants et peut-être des applications thérapeutiques.

Une question importante se pose alors : pourquoi après un tel éventail d’expérimentations conduisant à des résultats significatifs, ne trouve-t-on toujours pas, aujourd’hui, d’appareils Priore dans des laboratoires de recherche ?

La réponse se situe simplement au niveau de l’aspect humain. C’est ce volet qui a empêché la découverte d’Antoine Priore de devenir un objet de recherche scientifique « normal ».

Les facteurs humains qui ont joué sont nombreux, on peut mettre en exergue les plus marquants :

  • l’attitude de méfiance d’Antoine Priore, qui, pour se protéger d’un éventuel pillage de son invention, entourait ses appareils d’écrans de fumée et de mystère. Méfiance considérablement exacerbée par les manœuvres, à peine dissimulées, de la part de certaines personnes ayant travaillé avec lui pour s’accaparer sa découverte ;
  • le fait que certains décideurs, en raison de son comportement, aient d’emblée classé Antoine Priore comme guérisseur et charlatan, avec les conséquences que l’on imagine ;
  • la parution, dans la presse populaire et spécialisée de dizaines d’articles consacrés à l’affaire, soit dithyrambiques du style : « Priore, l’homme qui a vaincu le cancer ! », soit résolument opposé comme : « Affaire Priore ! Arrêtez ce charlatan ! », ont beaucoup influencé le monde scientifique et médical ;
  • les jalousies et les coups bas d’un certain mandarinat médical qui se servait du parfum de souffre entourant « l’Affaire » pour régler des comptes personnels et professionnels. Ces comportements ont participé à la sensation de malaise que le seul mention du nom de Priore provoquait ;
  • il y a eu, en plus, les facteurs aggravants tels que la frilosité, la paresse intellectuelle, la suffisance, la malhonnêteté, l’égoïsme, etc., attitudes communes à toute activité sociale.

Cependant, à notre avis, le facteur critique qui a décidé le sort de l'affaire Priore était :

  • les promesses non tenues vis-à-vis des administrateurs de la science française.
Malgré les critiques, de bonnes et de mauvaises foi, un certain nombre d'administrateurs ont su prendre la risque de soutenir Antoine Priore et ses associés. En contrepartie, Antoine Priore, la société Leroy-Somer ont pris des engagements et, malheureusement, la quasi-totalité de ces engagement n'ont pas été tenues. Avec comme conséquence que les administrateurs qui ont fait confiance, en assouplissant quelques règles administratives, ne font plus confiance.
Notre étude du dossier nous a convaincu, que si les engagements avaient été tenues, le 'rayonnement Priore' serait étudié aujourd'hui dans tous les laboratoires de biophysique du monde.

Nous allons tenter de dégager les aspects humains les plus importants qui ont conduit au naufrage de la découverte. Les frontières des interactions humaines sont presque toujours floues et mal définies et, évidement, il n’est pas facile de démêler cet imbroglio. Nous serons obligés pour analyser les problèmes de les circonscrire et de les sortir en partie de leur contexte. Aucune des interactions et enchevêtrements ne pourra être décrite succinctement, ce qui amène fatalement à des redites.

Il y a sept points qui nous paraissent essentiels :

  1. La personnalité d’Antoine Priore.
  2. L’action de la mairie de Bordeaux.
  3. Les promesses non tenues.
  4. Les problèmes entre les priorephiles.
  5. Les attaques des priorephobes.
  6. Les problèmes posés par les médias.
  7. Les facteurs diffus.

Nos propos pourront à l’occasion passer pour des « ragots » aux yeux de certains. Nous nous sommes malheureusement contentés de rappeler certaines situations humaines et historiques en nous efforçant de faire appel le moins possible à des opinions personnelles !

La personnalité d’Antoine Priore[modifier | modifier le wikicode]

La personnalité d’Antoine Priore est le facteur central pour la compréhension de «l’Affaire». Selon que l’on était de ses amis ou de ses détracteurs, Antoine Priore était :

jovial, bon vivant, monstrueux, fruste, désintéressé, paranoïaque, ami fidèle, égoïste, attentionné, borné, coléreux, aimable, blagueur, caractériel, amer, généreux, macho, séducteur, obstiné, rusé, bourrique, charlatan, honnête, bricoleur, génial...

Tout ces qualitatifs s’appliquaient à Antoine Priore et il y a probablement d’autres encore.

C’était dans le caractère d’Antoine Priore d’inspirer dévouement et fidélité. Les membres de son équipe fidèle (MM. Berlureau, Dezes, Durand, Genty, Léglise, Martinez, Plantin, Prémont, etc.) étaient des inconditionnels. Ils étaient toujours prêts à travailler bénévolement, tard la nuit, les week-ends ou les vacances, et à donner un coup de main à n’importe quel moment. Ils attestent qu'Antoine Priore était de nature généreuse. Il invitait facilement au restaurant, faisait des cadeaux de Noël, apportait toujours quelque chose pour les ouvriers de S.O.V.I.R.E.L. qui travaillaient sur ses lampes, etc.

Pour certains, qui le connaissaient mal, Antoine Priore avait la réputation d'être colérique. Il est vrai, par exemple, que le Pr Pautrizel, en le voyant lors d'une crise, le visage empourpré, agité de tremblements, etc., avait peur pour sa santé. Mais, selon les témoignages de MM. Genty et Prémont, les colères d'Antoine Priore n'étaient jamais des franches engueulades, les yeux dans les yeux.

Apparemment, si Antoine Priore était contrarié, il encaissait son mécontentement en silence, puis quand la pression intérieure devenait trop grande il explosait, ailleurs, souvent avec ses proches, et très rarement avec la vraie source de son mécontentement. Un observateur extérieur, ne connaissant pas l'historique, voyait que la saute d'humeur d'Antoine Priore, apparemment sans rapport avec le contexte.

C’est sans doute grâce à son mauvais caractère et à son entêtement qu’Antoine Priore est parvenu à réaliser ses appareils et à observer l’effet de leur rayonnement.

Malheureusement, c’est aussi à cause de certains aspects de son caractère qu’il était lui-même, à notre avis, son pire ennemi. Nous allons surtout mettre en exergue ces aspects « négatifs ».

Cependant, il ne faudra ni oublier ses qualités, ni les mensonges et les bassesses dont il fut l’objet.

Il faut en particulier régler immédiatement le compte au qualificatif de vénal qui servit à dénigrer Antoine Priore et qui ne lui est absolument pas applicable. Il était tout, sauf intéressé financièrement.

  • On lui a proposé de l’argent pour aller travailler à Rome, à Londres, aux États Unis, etc., Antoine Priore a toujours refusé de quitter Bordeaux.
  • Les malades qu’Antoine Priore traitait, sous direction médicale, étaient soignés gratuitement[1]. Selon les souvenirs de P. Genty, il n'était pas rare que les plus démunis entre eux partaient avec un 'petit billet' en poche.
  • Dès le début de sa collaboration avec le Pr Pautrizel, Antoine Priore a systématiquement refusé d’accepter personnellement des dons d’argent et des subventions. Les sommes en question (pour un total d’environ un million de francs !) ont toujours été gérées par d’autres: l’université de Bordeaux (U.N.A.C.I.), la Mairie de Bordeaux, l‘A.D.E.R.A., le laboratoire du Pr Pautrizel.
L’argent était destiné à payer l’équipement de ses appareils. (Voir la lettre de Pautrizel[2] adressée à J. Chaban-Delmas). En effet, entre 1967 et 1972 Antoine Priore a été rémunéré en tant qu’Ingénieur radio-électronicien, par le contrat de la D.R.M.E. attribué au Pr Pautrizel. Puis, entre 1972 et 1981 par la société Leroy-Somer en tant que mandataire de la S.E.R.A.P. L’épouse d’Antoine Priore, Francine, a été employée entre 1969 et 1980 par la faculté de médecine de Bordeaux comme laborantine, affectée au laboratoire du Pr Pautrizel. Tous les aspects financiers de l’affaire sont détaillés dans la note Les finances de l'Affaire Priore.

Revenons maintenant en détail sur quatre points essentiels.

Le « secret Priore »[modifier | modifier le wikicode]

Le trait de personnalité qui a posé le plus de problème était son narcissisme: tout devait être centré sur sa personne. Le plus important pour lui était d’être reconnu un jour comme « l’homme qui avait vaincu le cancer ».

C’est pour cette raison qu’il protégeait tous ses secrets, il voulait rester le passage obligé en toutes circonstances. On comprend alors qu’il avait très peur d’être dépossédé de sa découverte.

Le « secret de Priore » a alimenté les fantasmes des priorephobes et des priorephiles.

  • Pour les premiers, « le secret » était le signe d’une escroquerie sous-jacente.
  • Pour les seconds, une partie importante de leur combat fut de « protéger les droits de Priore ».

Les deux points de vue sont défendables.

Il est évident qu’un charlatan aurait eu le même comportement qu’Antoine Priore. Les exemples sont légions. Or il est impensable d’accepter une thérapeutique basée sur une « boite noire ». Le mode de construction et le mode opératoire des appareils thérapeutiques les plus sophistiqués sont parfaitement décrits et publics. Leur mode d’action n’est par contre pas toujours parfaitement élucidé. Il n’était bien évidemment pas nécessaire de savoir a priori comment le rayonnement émis agissait. Pour prendre un exemple simple et particulièrement significatif, l’aspirine est d'un usage courant depuis plus d’un siècle et la totalité de ses effets, longtemps méconnus, surprenne toujours. L'explication de son mode d’action est révisée régulièrement !

Le souci de la préservation des droits de Priore, qui relève de l’honnêteté intellectuelle, a beaucoup conditionné l’action de ses défenseurs et a ajouté à la complication de « l’Affaire ». La découverte excitait la convoitise d’un certain nombre de « requins » qui voyaient leur rapacité aiguisée du fait qu’Antoine Priore n’avait ni statut officiel, ni poids financier. Il était plus que probable qu’une fois compris le fonctionnement de son appareil, il leur aurait été facile de le dépouiller et de le laisser pour compte.

Il est nécessaire et légitime dans ce monde de contrefaçons de se protéger et de maintenir des « secrets d’usine ». Le procédé est courant dans le monde industriel en général et celui des laboratoires pharmaceutiques en particulier. Dans le cas d'un rayonnement électromagnétique d’un type spécial, une procédure de brevet était tout à fait envisageable, comme pour une molécule chimique, mais ceci nécessitait une description précise du rayonnement et de son mode de production. Le problème d’Antoine Priore est, à notre avis, qu’il se trouvait dans l’ignorance de ce qui, dans le rayonnement des appareils qu’il avait construit, avait l'effet biologique et qu’il était incapable de caractériser ce ou ces rayonnements d’une manière claire et précise. Probablement il n’en percevait pas l’intérêt ; sa seule préoccupation étant l’utilisation rapide du rayonnement au soin de malades cancéreux. Couvert par des brevets approximatifs et embrouillés, qui le protégeaient mal, voire pas du tout, il était contraint à un protectionnisme exacerbé.

Ses moyens :

  • ne rien expliquer à personne,
  • dresser des écrans de fumée autour des appareils,
  • ne les construire que chez lui,
  • être le seul à les manipuler.

De cette manière il tentait de protéger son «secret» en s’efforçant d’empêcher qui que ce soit de reproduire le même effet par d’autres moyens, non-couvert par les brevets.

À Bordeaux et nulle part ailleurs[modifier | modifier le wikicode]

Pour des raisons inhérentes à son passé de résistant, Antoine Priore avait des liens viscéraux avec la ville de Bordeaux. Il voulait que ses appareils soient construits dans la région bordelaise et nulle part ailleurs. Donc, pas question de faire des appareils à Paris, aux États Unis, en Italie,... Dans les contrats et licences signés avec la société Leroy-Somer il insista toujours pour inclure une clause selon laquelle la fabrication de toutes ses inventions devait se faire à Bordeaux.

Il voulait que des usines Antoine Priore, à Bordeaux, produisent ses appareils en série (Voir[3] pour un projet entre Priore et les sociétés PRANA et SOVIREL et pour un projet[4], élaboré par la société LEROY-SOMER, de développement d’usines employant plusieurs milliers de personnes à la construction des appareils). Ces appareils, pré-réglés pour une thérapeutique et cadenassés, ne devant jamais être vendus mais loués aux utilisateurs.

Antoine Priore ne voulait même pas vendre ses appareils. L’idée lui était insupportable qu’ils puissent devenir la propriété d’autres que lui. Que ses appareils puissent être ailleurs que chez lui était déjà difficile à admettre. Il avait, à maintes reprises, déclaré: « Les appareils sont mes enfants, je les connais si bien... »[5]. Ce n’est certainement pas par hasard si le 21 novembre 1972 Antoine Priore a fait baptiser ses deux plus jeunes fils et fait inaugurer son laboratoire de recherches par Jacques Chaban-Delmas. (Voir[6] pour des photographies de ces deux événements.)

La folie des grandeurs[modifier | modifier le wikicode]

Autre trait de caractère d’Antoine Priore ; la mégalomanie, cette folie des grandeurs lui a beaucoup nui. À partir de 1960, il avait la certitude que ses appareils avaient un effet très important sur les cancers expérimentaux et il avait l’intime conviction que, sur les cancers humains, l’effet serait aussi spectaculaire. Plus les appareils étaient imposants et puissants, plus les effets sur les animaux étaient augmentés. Par exemple, la bobine magnétique principale, en 1960, pesait 50 kg, en 1969 ; 500 kg, en 1977; 6 000 kg. De même, la lampe à décharge de 1957 mesurait environ 20 x 60]cm  ; celle de 1977 60 x 700 cm, et l’appareil entier pesait 50 tonnes !

Fort de ses certitudes, il jugeait inutile d’essayer de comprendre l’action du rayonnement ou de construire une série d’appareils fiables de faible puissance. Il fallait brûler les étapes et faire dans le gigantisme, puis soigner des malades, le plus vite possible...

Au lieu d’utiliser les crédits d’État (3,5 MF) à la construction, comme prévu dans le contrat, d’un appareil type de P4 à l’aide de composants fiables, Antoine Priore, par sa force de caractère, par chantage et par obstination a embarqué la société Lerot-Somer dans la construction de l’énorme M600... et vers l’échec.

Antoine Priore ‘le parano’ ?[modifier | modifier le wikicode]

Indubitablement Antoine PRIORE était narcissique et avait des tendances mégalomanes. Il fut souvent traité de paranoïaque. Il faut, pour accréditer cette accusation, revenir à la définition du terme. Est « paranoïaque » une personne faisant montre, sans raison valable d’une défiance extrême envers ‘les autres’.

Or Antoine Priore avait de très bonnes raisons de se méfier des autres. Toute une faune tournait autour de lui et de sa découverte, certains y voyant la fortune et la gloire assurée pour eux-mêmes, s’ils arrivaient à piller ce pauvre Priore. Beaucoup n’ont pas ménagé leurs efforts, C’est ainsi qu’il a dû subir les attaques ignobles et malhonnêtes venant de personnes censées représenter un certain code d’éthique et de morale.

Pendant des années, Antoine Priore a côtoyé des «grands» de ce monde (Prix Nobel, scientifiques de réputation mondiale, hommes politiques du premier plan etc.) qui l’ont traité avec la considération que l’on porte à quelqu’un ayant fait une découverte de toute première importance alors que simultanément il était vilipendé par des membres éminents du monde médical comme un quelconque guérisseur. Les attaques dont il fut l’objet ne pouvaient que laisser des traces. Son psychisme en a souffert et il s’est protégé par une méfiance à l’égard des autres, ce qui, à notre avis, était tout à fait compréhensible.

Avec une telle personnalité, on imagine facilement les problèmes épineux qui ont pu se développer avec des scientifiques de l’Establishment, qu’ils soient septiques a priori, ou prêts à être convaincus. Les commissions d’attribution de crédits d’État sont habituées à fonctionner dans une certaine orthodoxie. En outre, nombre de décideurs et d’administrateurs qui voyaient la situation de loin n’ont pas cherché à approfondir leur connaissance du dossier: pour eux, Antoine Priore était un charlatan. En fonction de cette conviction, les blocages et les conflits devenaient inévitables entre les scientifiques qui travaillaient avec Priore et les politiques qui souhaitaient que leurs recherches soient menées à l’intérieur d’un cadre légitime.

Références[modifier | modifier le wikicode]

Le rôle de la mairie de Bordeaux[modifier | modifier le wikicode]

Les interventions de Jacques Chaban-Delmas dans l’Affaire Priore sont nombreuses. Son raisonnement était simple : « Je ne suis pas moi-même scientifiquement compétent pour juger de l’importance des travaux d’Antoine Priore, mais quand le Secrétaire Perpétuel de l’Académie des Sciences, un Prix Nobel de Médecine et des chercheurs de renommé internationale me disent qu’il y a un effet et que c’est important, je réagis. »

En conséquence il a utilisé son influence personnelle de maire, de député, de Premier ministre et de président de l’Assemblée nationale à maintes reprises pour aider Antoine Priore. Mais, pour la gestion quotidienne de ses actions il déléguait son autorité à :

  • Gilbert Leroi, secrétaire général de la mairie,
  • Jacques Valade, son adjoint et professeur à la faculté des sciences.

Pour aider Antoine Priore matériellement la mairie avait :

  • Mis à la disposition d’Antoine Priore une main d’œuvre municipale, indispensable au montage des appareils,
  • Payé nombre de ses factures d’électricité[1].

En contrepartie, le fait que J. Chaban-Delmas exerça une pression sur la D.G.R.S.T. pour qu’elle octroie une subvention de 3,5 MF. provoqua une forte animosité dans le milieu de la recherche médicale où les subventions étaient devenues rares et difficiles à obtenir. Le délégué général, Pierre Aigrain et le directeur du C.N.R.S. Hubert Curien, ne cachaient pas leur agacement.

La situation se dégrade encore lorsque, suite à l’intervention de J. Valade et de G. Leroi, la subvention, destinée initialement à construire un appareil dans un laboratoire universitaire, est accordée directement à la société Leroy-Somer.

Les liens entre la mairie de Bordeaux et Georges Chavannes, P.D.G. de Leroy-Somer, avaient également une dimension politique. Ce dernier tenait une place très importante au sein de la famille politique de J. Chaban-Delmas. Il est d’ailleurs devenu ministre dans le gouvernement de Jacques Chirac entre 1986 et 1988 (alors que Jacques Valade était ministre de la recherche). On peut penser que l’aide apportée par G. Leroi et J. Valade à Antoine Priore n’était pas, d’une certaine manière, sous-tendue que par des considérations altruistes.

La société Leroy-Somer voulait garder son monopole industriel sur les appareils d’Antoine Priore, même s’il fallait pour cela écarter des contributions financières très importantes en provenance de tiers, car elles auraient forcement réduit d’autant leur éventuelle ‘part au gâteau’. Une certaine collusion existait entre G. Chavanes et la mairie de Bordeaux à l’encontre de partenaires financiers potentiels.

On peut, pour étayer cette assertion, citer :

  • l’intérêt de la Fondation Mérieux[2] à un partenariat, à condition que l'appareil soit construit dans un laboratoire universitaire.
  • la note de H. GOSSOT[3] où est rapportée la manière dont l’entourage de J. Valade a ordonné l’arrêt des pourparlers avec des financiers sérieux (de Laage, Salmon et Poncet) afin de laisser le champ libre à Leroy-Somer,
  • les notes concernant J. C. Mimram en 1980[4] et M. Stevens en 1981, qui tous deux ont été écartés par la mairie de Bordeaux.

On peut en outre consulter la lettre[5] de J. M. Graille adressée à J. Valade et le compte rendu de P. Chateaureynaud[6] pour quelques éclaircissements sur le rôle funeste de la mairie de Bordeaux dans l’Affaire.

Il y a eu aussi, en 1979, la création d’une association : Laboratoire de Recherches Scientifiques Antoine Priore (LARSAP)[7] entre A. Priore, F. Priore et G. Leroi qui avait pour but de gérer les financements de l’Affaire.

Même après la mort d’Antoine Priore en 1983, la mairie de Bordeaux a continué à protéger les intérêts de G. Chavanes et de Leroy-Somer. Deux équipes avaient l’ambition de reconstruire un appareil Priore:

  • l’équipe Leroy-Somer (J-P. Bader, A. Farago, P. Genty, P. Ribeau) ;
  • l’équipe universitaire (A-M. Bottreau, A. Caristan, P. Chateaureynaud, J. Joussot-Dubien, J-M. Moreau, R. Pautrizel, B. Veyret).

Lors d’une réunion dans un restaurant bordelais (Le Dubern) entre MM. Bader, Chavanes, Leroi, Ribeau, Valade et Joussot-Dubien, il fut exigé que l’équipe universitaire ne tenterait pas de reproduire dans l’immédiat un appareil Priore, ceci pour laisser le temps à l’équipe Leroy-Somer de reconstruire le M600[8].

Références[modifier | modifier le wikicode]

Les promesses non-tenues[modifier | modifier le wikicode]

Un facteur très aggravant dans le blocage final de l’affaire est une série de promesses non-tenues envers divers administrateurs et scientifiques. Des délais et aléas, habituels et acceptables dans un projet de recherche classique, deviennent sources de soupçon et de méfiance dans un contexte ou rumeurs de fraude, de charlatanisme et d’escroquerie règnent :

  • un dépassement de budget est perçu comme une escroquerie,
  • un délai légitime dans une réalisation technique est considéré comme un signe d’incompétence,
  • une impossibilité matérielle de procéder à une expérience biologique est interprétée comme une dérobade.

Quelques exemples, dont les détails sont exposés dans les Notes[1]:

  • la promesse, en 1965, de G. Chavanes de vendre un appareil Priore fantôme à l’I.R.S.C. de Villejuif, suivi d’un démenti d’Antoine PRIORE ;
  • la promesse des professeurs Courrier et Pautrizel en juin 1966 que la D.G.R.S.T. serait en mesure d’effectuer des expériences de contrôle dans les plus brefs délais sur un véritable appareil Priore, alors que l’appareil en question, très vétuste, tombe irrémédiablement en panne en août 1966 ;
  • la promesse, en mars 1967, de G. Chavanes que son appareil Priore 'fantôme' serait bientôt mis à la disposition des biologistes désignés par la D.G.R.S.T., suivi encore d’un démenti d’Antoine Priore.
  • entre 1972 et 1979 une longue série de promesses et d’affirmations très optimistes de P. Ribeau à la D.G.R.S.T. selon lesquelles l’appareil qu’elle a financé sera bientôt en état de fonctionnement. En plus, aucune des obligations de la société Leroy-Somer stipulées dans le contrat étaient honorées.

Les répercussions de ces manquements étaient quadruples.

D’abord, Antoine Priore en a subi des conséquences fâcheuses, que ce soit le ternissement de sa réputation, déjà assez sombre vis-à-vis de la science orthodoxe, ou la dégradation de sa santé. Il s’est effectivement surmené en tentant de rattraper les prévisions trop optimistes de son entourage.

Ensuite, ceux qui ont accepté toutes ces promesses, souvent malgré un certain scepticisme, ont eu à en subir des contrecoups. C’était avec le souci de donner une chance à PRIORE, qu’ils ont assoupli les procédures habituelles. Mais, en agissant ainsi, en cas d’échec, ils étaient en porte à faux avec leur propre entourage, qui était quelque fois prêt à exploiter toute faiblesse pour les évincer et prendre leur place. Cet aspect, dérisoire dans l’absolu, rendait certains de leurs successeurs beaucoup plus frileux et plus méfiant quand il s’agissait de prendre les mêmes risques.

Les manquements contractuels fermaient la porte à toute nouvelle subvention.

Et finalement, on peut raisonnablement extrapoler l'avenir, SI l'I.R.S.C. de Villejuif avait eu un appareil Priore qui fonctionné en 1966, que SI la D.G.R.S.T. avait eu l'appareil qu'elle pensait subventionner en 1971. Avec au moins un de ces deux appareils en fonctionnement, toutes les critiques, toutes les oppositions tombaient. La responsabilité pour le premier échec est à imputer à la société Leroy-Somer et pour le deuxième, c'était due à la mégalomanie d'Antoine Priore et la complicité de la société Leroy-Somer.

Références[modifier | modifier le wikicode]

Les problèmes entre les Priorephiles[modifier | modifier le wikicode]

Le groupe de priorephiles était très hétérogène. Le seul lien entre ces individus était la certitude ou l’intime conviction que le rayonnement émis par les appareils avait des effets biologiques spectaculaires. On peut ensuite distinguer à l’intérieur du groupe :

  • ceux qui ne considéraient que la découverte fondamentale et le potentiel thérapeutique,
  • ceux qui voyaient un potentiel financier pour eux-mêmes, si seulement...,
  • ceux qui rêvaient de leur influence et de leur propre gloire,
  • ceux qui, malades, y voyaient leur salut.

Avec des intérêts aussi divergents les conflits étaient imaginables et inévitables.

  • Conflits entre Antoine Priore et les scientifiques qui voulaient faire rentrer « Le rayonnement Priore » dans le giron de la science orthodoxe. Antoine Priore n’acceptait pas les contraintes de l’orthodoxie (comme par exemple la reproductibilité des expériences et le placement d’appareils dans d’autres laboratoires). En résumé, son attitude était: « Je sais que ça marche, vous savez que ça marche. Terminons en avec l’expérimentation animale..., et construire des gros appareils pour soigner des malades... »
  • Conflits entre Antoine Priore et la société Leroy-Somer.
Cette société voulait faire fortune rapidement et à peu de frais en parasitant Antoine Priore.
  • Antoine Priore, de son côté, voulait exploiter la société Leroy-Somer. Pour lui cette société n’était qu'une vache à lait servant à l’aider à la construction de ses appareils. Il ne l’a jamais considéré comme partenaire, à tel point qu’aucun des personnels de Leroy-Somer n’a jamais eu accès à son «secret». Ces relations, qui peuvent paraître sadomasochistes mais ils sont pour les deux parties fondamentalement intéressées, sont décrites en détail dans la Note[1]. Il n’est rien de dire que cette association industrielle fut catastrophique pour le déroulement et un bon dénouement de l’affaire PRIORE.
  • Conflits entre Antoine Priore et certains chercheurs, qui auraient vu d’un très bon œil le secret de Priore chez eux, afin de le développer pour leur compte personnel :
A-J. Berteaud du C.N.R.S., après les mesures qu’il avait faites avec A-M. Bottreau, a construit à Bellevue en 1972, en dehors d’Antoine Priore, un appareil simplifié pour le compte de la D.R.M.E. Par la suite H. Gossot[2] a voulu déclarer Berteaud et Bottreau persona non grata à Floirac.
G. Delmon dans les années 60, après ses expériences avec J. Biraben, a contacté[3] la société S.O.V.I.R.E.L. pour qu’elle lui fabrique une lampe, comme chez Priore...
Conflits entre chercheurs et Leroy-Somer sur le lieu d’implantation de l’appareil prototype, financés par la D.G.R.S.T. entre 1971 et 1977. Les chercheurs considéraient qu’un prototype expérimental, vu les controverses du passé, serait plus crédible et acceptable par le monde scientifique et médical s’il était localisé sur un site public - universitaire. La société Leroy-Somer et Antoine Priore, d’accord entre eux sur ce point, voulaient garder la main mise sur l’appareil en le laissant chez Antoine Priore.

Références[modifier | modifier le wikicode]

Attaques des Priorephobes[modifier | modifier le wikicode]

Le groupe de priorephobes est constitué principalement de médecins universitaires de plusieurs catégories :

  • Les priorephobes actifs, ceux qui se sont informés et qui pour des raisons qui leur étaient propres étaient contre. ;
  • Le priorephobes ‘moutons’, qui ne connaissaient pas vraiment le dossier, qui n’étaient pas suffisamment intéressés pour faire l’effort de s’informer et qui ont choisi un camp, celui des priorephobes actifs ;
  • Les priorephobes opportunistes qui se servaient de l’odeur de souffre attaché à «l’Affaire» pour mener des actions personnelles n’ayant rien à voir avec Antoine Priore.

Voici quelques exemples de comportements observés chez les priorephobes, on trouve :

  • Des gens qui pensaient sincèrement qu’il fallait combattre les priorephiles et qui l’ont fait frontalement et ‘honnêtement’.
Le 1er mars 1965, le Pr Lacassagne, par son intervention[1] à l’Académie des sciences concernant l’extrapolation des résultats obtenus sur des animaux au traitement des cancers humains, a certainement réagi à quelques articles dans la presse populaire, publiés quelques jours avant la présentation par le Pr Courrier, qui dévoilaient le contenu de la communication et traitaient Priore comme l’homme qui avait vaincu le cancer. Il est certain qu’une telle situation est très irritante pour la nomenklatura médicale. La réaction épidermique est d’écraser l’intrus.
Le Pr André Lwoff, en écoutant uniquement ses collègues, est priorephobe épidermique de mars 1965 à mai 1969[2]. Quand il prend connaissance en 1969 des travaux de la commission de contrôle[3] il forge son propre opinion et devient priorephile actif.

D'autres pensaient, pour des raisons qui leur étaient propres, qu’il fallait combattre les priorephiles et ils l’ont fait sournoisement et malhonnêtement.

L’exemple type est celui du Pr Raymond Latarjet, ancien directeur de l’Institut du radium et très important administrateur de la recherche médicale en France. Durant trente ans il a entretenu insidieusement une rumeur : les animaux cobayes guéris par l’appareil de Priore étaient des animaux sains, substitués aux animaux malades.
Le rapport des professeurs Bernard et Latarjet du 22 mars 1982, adressé au ministre de la recherche, était tronqué et très partiel. Voir [4] pour une analyse argumentée de ce document et de les rumeurs entretenue par le Pr Latarjet.)

Dans la bataille pour l’obtention de postes ou de crédits de recherche, on oppose fréquemment la médiocrité à l’excellence

Le moyen le plus sûr d’ôter toute crédibilité au concurrent est une bonne insinuation de scandale. Ceci permet de faire octroyer un poste à l’un de ses protégés plutôt qu’à l’équipe à laquelle il revient par mérite...
Il suffit que, dans les commissions qui partagent le gâteau des crédits de recherche, une personne « bien informée et très respectable », hausse les sourcils en disant: « Vous savez, c’est si délicat, M. le professeur X est lui-même parfaitement honnête et intègre, mais il travaille avec des charlatans... » et le Pr X n’obtient pas de subvention pour ses travaux. L’argent va ailleurs, souvent chez un professeur « bien informée et très respectable ».
De nombreux exemples de ce type d’agissements contre le Pr Raymond Pautrizel existent. Le plus scandaleux étant son élimination de la direction de l’Unité de recherches I.N.S.E.R.M. (U89) et le transfert de cette Unité à Lille, chez le rapporteur de l’U89 auprès de la commission ! Le malaise provoqué par l’affaire Priore fut utilisé très habilement, sans jamais critiquer les expériences, qui sur un plan biologique étaient irréprochables. Les détails de cette procédure déshonorante pour l’I.N.S.E.R.M. sont analysés dans la Note[5].

D’autres exemples:

  • La candidature de M-R. Rivière pour un poste de professeur à titre personnel. Lors de la réunion de la commission il a suffit de quelques ricanements avec prononciation du nom de Priore pour que Rivière soit déclassé[6].
  • La candidature de M. I. Chouroulinkov de l’I.R.S.C. (Institut de Recherches Scientifiques sur le Cancer) au C.N.R.S.[7], classé N° 1 des promouvables par la commission de pathologie expérimentale. Le Pr Gallais, président de la commission, suggéra de le déclasser, car il avait trempé dans « l’affaire de Bordeaux ». Le Pr Mathé, présent, empêcha l’inversion de classement, en précisant que Chouroulinkov n’avait rien publié sur ce sujet.
  • Sir Alexander Haddow, directeur du Chester Beatty Institute, a arrêté la collaboration avec Priore, sur les conseils du Pr Latrjet : le Pr Haddow ne voulait pas que son nom, et le nom de son Institut, soit mêlé à un scandale scientifique.
  • Sous la pression de leurs supérieurs hiérarchiques, Rivière et Chouroulinkov de l’I.R.S.C. de Villejuif, ne voulaient pas publier leurs travaux concernant l’influence du rayonnement Priore sur la croissance cellulaire, réalisés en collaboration avec Ambrose, en ayant Antoine Priore comme coauteur[8].
  • Également sous la pression de leurs directeurs respectifs (Le Pr Vautier et le Pr Servant), A-J. Berteaud et A-M. Bottreau n’avaient pas le droit d’indiquer le nom de leur laboratoire d’appartenance dans la publication[9] qui faisait état d’une partie de leur travail pour le contrat de la D.R.M.E.[10]. Ils avaient pourtant obtenu l’autorisation écrite[11] du C.N.R.S. pour réaliser ce travail !

Références[modifier | modifier le wikicode]

Problèmes posés par les Médias[modifier | modifier le wikicode]

L’analyse détaillée du traitement de l’affaire PRIORE par les médias est l’objet de la Note[1]. Il y a eu plus de 300 articles dans la presse populaire, des émissions et des reportages à la télévision et à la radio, deux livres sur l’affaire et une demi-douzaine de livres ou thèses comportant des chapitres consacrés à l’Affaire Priore.

La publicité que les médias donnaient à l’Affaire était de trois types :

  • gros titres à scandale,
  • exposés par des journalistes peu informés,
  • exposés par des journalistes qui se sont informés de façon contradictoire.

Le premier type d’article était sans grande importance. Qu’un journal comme Ici Paris, Minute ou Le Meilleur aient fait des gros titres sur Antoine Priore, qu’ils l'aient traité de génie ou de charlatan, que l’article ait été diffamatoire, blessant ou dithyrambique n’a pas d’importance à terme. Ces articles ont vite été oubliés. D’une manière générale on prête moins de crédit (parfois à tort !) à la presse populaire qu’à la presse dite sérieuse.

Le vrai problème était la presse dite sérieuse comme Le Monde, L’Express ou La Recherche, très lus dans les milieux universitaires. Ces articles ont influencé le milieu scientifique, pour qui ils étaient globalement la seule source d’information.

On y traitait Antoine Priore de guérisseur et de charlatan. On donnait une fausse description des faits, on occultait des expériences indiscutables, on répandait la rumeur de substitution du Pr Latarjet. Cette presse a fortement contribué à noircir le nom d’Antoine Priore dans l’esprit des universitaires. Impression qui était dominante, bien sûr, lors des commissions, des réunions etc. où des décisions étaient à prendre.

Un exemple: une attaque virulente, avec photographies truquées et propos mensongers contre Antoine Priore à été publiée dans L’Express[2] par G. Bonnot, le 17 mai 1971. Une lecture plus attentive de cet article révèle qu’il est conçu pour lier le nom de Jacques Chaban-Delmas à « une escroquerie scientifique avec usage de fonds publics à des fins douteuses… » (Il ne faut pas oublier le contexte politique de l’époque: J-J. Servan-Schreiber, patron de L’Express, fut candidat malheureux contre J. Chaban-Delmas à la mairie de Bordeaux...)

Le Monde, sous la plume du Dr Claudine Escoffier-Lambiotte, a publié entre 1965 et 1985 une série d’articles[3] concernant l’affaire Priore. L’auteur n’a jamais rencontré les chercheurs qui avaient fait des expériences avec les appareils de Priore et n’a jamais pris en considération l’ensemble des travaux expérimentaux. Pour elle, Antoine Priore fut d’emblée, et jusqu’à sa mort en 1983, un guérisseur et un charlatan, qui substituait des animaux sains aux animaux malades.

Références[modifier | modifier le wikicode]

Facteurs ‘diffus’ provoquant des problèmes[modifier | modifier le wikicode]

Un certain nombre de facteurs diffus ont contribué à compliquer l’affaire. Ces facteurs ne sont pas spécifiques de ce qui nous occupe et on les retrouve quotidiennement ; ce sont des facteurs sociaux. Il n’est ni frivole ni inutile de les évoquer car, surajoutés aux problèmes spécifiques, ils rendaient la situation encore plus difficile à démêler.

  • La paresse intellectuelle est un trait de caractère humain qui a considérablement parasité priorephiles et priorephobes !

Le dossier de l’Affaire Priore, résumé en deux ou trois pages, est très étonnant. On « y croit » ou on « n’y croit pas ». Cette attitude subjective est la seule possible avec peu d’information.

S’informer vraiment sur le dossier, demande un travail considérable, même si l’on dispose d’un accès facile aux documents. Après leur lecture, reste le travail d’analyse, celui de la critique etc., nécessaires pour se forger une opinion valable, ce qui est là encore un engagement non négligeable.

On fait alors confiance à ceux qui, censés avoir étudié le problème, ont pris parti. Le choix se fait de manière affective, sur la notoriété d’un protagoniste, sur une humeur !

Or, dans l’ensemble, les décideurs, les médico-scientifiques trop occupés, souvent partisans du moindre effort, n’ont jamais cherché à approfondir leur connaissance du dossier et se sont forgé une doctrine sur une pléthore d’opinions a priori, superficielles, basées sur des « on dit que... » ou sur des préjugés non avoués. Quelques exemples typiques :

  • Le Pr Raymond Latarjet a répandu auprès de qui voulait l’entendre, pendant plus de 20 ans, une rumeur de substitution d’animaux par Antoine Priore et ses collaborateurs. Il n’a jamais recherché la moindre vérification auprès des soi-disant victimes, lésées par ce truquage, ni produit la moindre justification. (Voir la Note[1] pour les détails.)
  • En janvier 1984, R. Felden et R. Mainard, professeurs à la faculté des sciences de Nancy, ont publié un article dans Le Monde[2], où ils font un amalgame entre: la « machine de Priore », les « avions renifleurs », le « moteur à eau » et un certain nombre d’escroqueries.
Questionné par le Pr Adolphe Pacault[3] pour savoir s’il avait des informations personnelles pour corroborer ses assertions, le Pr Felden répondit par une lettre[4] qui illustre bien l’attitude de beaucoup « d’experts » qui sont capable de se prononcer sans connaître un dossier: «..... Aussi n’est-il pas nécessaire de connaître tous les documents relatifs à une affaire pour émettre un jugement...». Felden continue, et explique que la « machine Priore» ne pouvait avoir les effets prétendument observés, parce que, pour avoir de tels effets, l’appareil doit faire... ici quelques idées biologiques et physiques vagues et sans importance, suivi par: « mais cette explication contredit les lois de la physique, donc l’appareil Priore ne peut pas avoir d’effets !! ». Cette lettre fait l’objet d’un commentaire lapidaire[5] du Pr Pacault quant à l’épistémologie pratiquée par le Pr Felden !
  • Le Pr Lucien Israel (cancérologue), questionné en 1980, a émis un jugement négatif sur les travaux faits avec l’appareil d’Antoine Priore[6] en disant qu’ils n'avaient rien à voir avec l’immunologie et qu’il était parfaitement ignorant des résultats obtenus !
  • La suffisance intellectuelle : Antoine Priore ne faisait pas partie du sérail de la recherche officielle. Il était un amateur, un indépendant, un bricoleur du dimanche... L’attitude des professeurs de physique (A. Kastler, R. Servant, Y. Rocard) ou de médecine (A. Lacassagne, A. P. Lachapèle) était de dire: « Un amateur ne peut pas faire de découverte ou un travail de recherche intéressant, c'est le domaine exclusif des centres de recherche officiels »[7].
Les affirmations telles que :
« On ne comprend rien à son appareil » ;
« Oui, mais son appareil est trop compliqué, on peut faire mieux, plus simplement...»,
sous-entendent : « Si nous, professeurs, n’avons pas tout compris du bricolage de cet amateur en un clin d’œil, c’est qu’il n’y a rien à comprendre ». Cette attitude est autant plus navrante que, si l’on consulte les revues de recherche en physique expérimentale des années 1960, on trouve des centaines d’articles consacrés aux phénomènes de décharges dans des gaz en présence de champs magnétiques, champs hautes fréquences et micro-ondes. Le sujet était à la mode, même si les théories proposées pour expliquer les observations étaient très rudimentaires. Il est clair qu’il y avait beaucoup de travail expérimental à faire en physique avant d'avoir une compréhension globale du phénomènes produit par un appareil comme celui d’Antoine Priore. (Et cette remarque est toujours valable aujourd'hui.)
  • Objectivité scientifique : Sur la superficialité de beaucoup d’experts se greffe la notion d’objectivité scientifique. Pour nous, dans la notion d’objectivité scientifique est sous-jacente l’idée que les conclusions ne sont pas tirées avant d’entamer l’investigation, que l’on est prêt à une étude qui permette, à son terme de se prononcer pour ou contre et de dire clairement pourquoi !
Malheureusement, l’utilisation de l’expression objectivité scientifique est souvent un alibi pour ne se prononcer ni pour ni contre, et ménager l’avenir
Le rapport Bernard-Latarjet[8] est caractéristique de ce comportement. Les auteurs condamnent sans appel les travaux faits avec l’appareil Priore, mais concluent : « ... Les effets de la machine, s’ils sont exacts (et nous pensons qu’ils le sont)... ». Petite phrase destinée à se couvrir « au cas où » et qui démontre bien la qualité des experts rapporteurs, pour ne pas dire plus !
  • La comparaison des livres de J-M. Graille[9] et de J-P. Bader[10] est édifiante.
Le premier auteur, journaliste d’investigation, a, pendant plusieurs années, constitué un dossier contradictoire pour faire son opinion. Il se classe clairement dans le camp des priorephiles, mais avec une argumentation bien étayée.
Le deuxième auteur, professeur de médecine, administrateur de l’I.N.S.E.R.M., a eu toutes les possibilités de s’informer et de se forger une opinion, et il l’a certainement fait, mais il ne l’expose pas dans son livre. Il dit lui-même (page 100) qu’il était et reste dans l’ambiguïté, et, en référence à son rôle de conseiller scientifique à la D.G.R.S.T., il déclare: « En rentrant à Paris, j’ai rédigé un rapport ambigu qui ne dut pas être d’un très grand secours pour Pierre Aigrain. Ambigu, déjà, comme est la conclusion de ce livre... ».
Cependant, dans ses interviews à la radio et à la télévision[11] pour présenter son livre, J-P. BADER était plus loquace et catégorique. Il disait clairement qu’il pensait que l’effet biologique du rayonnement Priore était bien réel. Après le décès d’Antoine Priore il s’est même allié avec la société Leroy-Somer pour tenter de relancer la construction de l’appareil M600[12].
  • Un dernier exemple « d’objectivité scientifique » vient de la presse scientifique grand public. En mars 1976, le Pr Jacques de Certaines a publié un article[13] dans La Recherche, intitulé Heurs et Malheurs du Bioélectromagnétisme. Il y traite des problèmes humains que rencontre un chercheur qui veut faire des investigations en bioélectromagnétisme en général. À la suite de cet article, la rédaction de La Recherche demanda[14] au Pr de Certaines d’écrire un article objectif de 6 à 8 pages sur l’affaire Priore. La thèse du Pr de Certaines[15] intitulée: « La fin des disciplines closes: L’exemple de la biophysique » était illustrée en grande partie par l’affaire Priore à travers les articles de presse. Le professeur de Certaines était compétent pour s’exprimer sur le sujet. L’article fut écrit[16] et fut refusé par la rédaction de La Recherche[17] parce que la conclusion était favorable à Antoine Priore. Donc, pour La Recherche, un article objectif, écrit par un spécialiste de la discipline, ne peut contenir les conclusions catégoriques de l’expert, au nom de la sacro-sainte objectivité scientifique !
  • Le parisianisme (et son contraire) : Le parisianisme, caricaturé par hors de Paris, point de salut, fut aussi un facteur dans la génération et dans l’entretien des conflits.
Exemple : après la présentation des travaux de Rivière, Guérin et Priore en séance publique à l’Académie des sciences par le Pr R. Courrier, le 1 mars 1965, une seule suite pouvait être envisagée : Antoine Priore devait amener son appareil à Paris pour que des spécialistes puissent l’examiner. Il n’était pas question bien sûr, que les spécialistes fassent le voyage à Bordeaux, le Pr Bernard Halpern (qui travaillait sans succès sur la guérison des rats greffés avec la tumeur T8) s’y refusait catégoriquement. De son côté le Pr Lacassagne critiquait d’éventuelles expériences peu sérieuses où des rats, greffés avec des tumeurs à Paris, auraient été transportés à Bordeaux pour traitement, puis ramenés à Paris. (J. Biraben et G. Delmon effectuaient les mêmes expérience en greffantnt des rats à Bordeaux et les traitant à Bordeaux et Lacassagne le savait.). Donc pour le Pr Lacassagne une expérience "sérieuse" nécessitait de greffer les rats à Paris et de les traiter à Paris !
Bien sûr, cette attitude des « parisiens » n’était pas générale. Par exemple, Rivière, Guérin, Chouroulinkov de l’I.R.S.C. et Avraméas de l’Institut Pasteur ont fait des expériences avec l’appareil de Priore et MM. Gresser, Fauvre et Robert se sont proposés d’en faire.
Malheureusement, Antoine Priore n’était pas mieux que les « parisiens », puisque pour lui, c’était « Bordeaux et nulle part ailleurs ».
  • Le sens attribué au mot ‘magnétisme’ en France. Dans les années 1950 - 1980 l’association des mots magnétisme, champ magnétique, guérison des maladies graves évoquaient dans l’esprit du grand public, et même chez des intellectuels non-physiciens, la faune des « guérisseurs » et des « magnétiseurs » ainsi que le « magnétisme animal » et Franz Mesmer. Tout ceci rime naturellement avec « charlatanisme ».
Dans les pays anglo-saxons le mot « mesmérisme » est synonyme du mot hypnose et n’a rien à voir ni avec des champs magnétiques, ni avec un quelconque « magnétisme animal ». Ceci correspond mieux aux faits historiques concernant Mesmer, qui pratiquait une psychothérapie avant la lettre, en utilisant l’hypnose, un peu comme Charcot et Freud ont fait 75 ans plus tard. Voir J. de Certaines[13],[15] pour un aperçu historique de Mesmer et le mémoire de M. Pinsolle[18] pour une analyse détaillée du mesmérisme en Aquitaine.

Références[modifier | modifier le wikicode]

  1. Les souris anglaises
  2. Le Monde 11 janvier 1984, « Le pouvoir politique et la communauté scientifique »
  3. A. Pacault, « Lettre adressée à R. Felden le 13 janvier 1984 »
  4. R. Felden, « Lettre adressée à A. Pacault le 20 janvier 1984 »
  5. A. Pacault, « Lettre adressée à R. Pautrizel le 23 janvier 1984 »
  6. L. Israël, « Lettre adressée à C. Meunier le 13 novembre 1980 »
  7. Concours Médical du 20 mars 1965, « Cancer : une nouvelle affaire »
    L'Intransigeant du 5 mars 1965, « Priore à "soigné" aussi des hommes »
    Echo de la mode du 21 mars 1965, « Les souris ne sont pas des hommes »
  8. J. Bernard et R. Latarjet, « Le problème Priore (1960-1981) »
  9. Jean-Michel Graille, Dossier Priore : Une nouvelle affaire Pasteur ?, Paris, Denoël, , 305 p. (ISBN 2-207-23002-3)
  10. Jean-Pierre Bader, Le cas Priore : Prix Nobel ou imposture ?, Paris, J.C. Lattès, , 223 p.
  11. J-P. Bader, « Radio Bordeaux Gironde 17 avril 1984 »
    J-P. Bader, « FR 3 18 avril 1984 »
    J-P. Bader, « France Inter - 4 juin 1984 »
  12. Leroy-Somer
  13. 13,0 et 13,1 La Recherche, juin 1976, « Heurs et malheurs du biomagnétisme »
  14. J. de Certaines, « Lettre adressée à R. Pautrizel le 10 décembre 1976 »
  15. 15,0 et 15,1 J. de Certaines, « La fin des disciplines closes : l'exemple de la biophysique »
  16. J. de Certaines, « Marginalité et orthodoxie dans la recherche : l'exemple de l'Affaire Priore »
  17. Y. Christen, « Lettre adressée à J. de Certaines le 12 octobre 1977 »
  18. M. Pinsolle, Mémoire pour le certificat d'étude spécialisée de psychiatrie, Le Mesmerisme en Aquitaine à la fin du XVIIIe siècle, soutenu le 11 septembre 1990.

Conclusion[modifier | modifier le wikicode]

Nous avons évoqué quelques problèmes purement humains qui ont fortement contribué au blocage du développement des recherches scientifiques sur le rayonnement émis par les appareils d’Antoine Priore.

Il faut prendre leçon du passé et essayer d’éviter les écueils qui sont :

I. L’égoïsme
II. La convoitise
III. La suffisance,
IV. La paresse intellectuelle,

dans toute nouvelle tentative d’étude des appareils de Priore.