Le mouvement Wikimédia/La naissance du mouvement Wikimédia

Un livre de Wikilivres.


Il existe, dans l’espace web, d’innombrables archives à partir desquelles il est possible de revivre les événements qui ont conduit à la naissance du mouvement Wikimédia. Cette « préhistoire » du mouvement peut notamment être découverte sur le site de Framasoft, un réseau d’éducation populaire crée plus ou moins un an avant le lancement de la version francophone de Wikipédia. Le site web de cette association apparait de fait comme une vraie mine d’informations au sujet des logiciels libres et de la culture libre qui s’est développée tout autour. Soit deux évènements culturels majeurs apparus dans l’histoire du développement informatique, d’Internet et de ses applications, et pourtant restés peu connus jusqu’à ce jour.

Le tableau La création d'Adam de Michel-Ange retouché par un Wikimédien de telle sorte à faire apparaitre le logo de Wikipédia entre le doigt de Dieu et celui d'Adam
Figure 2. La création d’Adam de Michel-Ange revisitée par un contributeur de Wikipédia.

Grâce à Framasoft et bien d’autres associations, il est ainsi possible de découvrir l’organisation et les motivations de milliers, voir de millions, de développeurs bénévoles actifs au sein du mouvement du logiciel libre. On y append, entre autres, que ce mouvement politique et sociale fut initié en 1983 par Richard Stallman, un programmeur du Massachusetts Institute of Technology (MIT), qui eu pour idée d’offrir à chacun et chacune, une alternative à la marchandisation du secteur de l’informatique.

Cette philosophie de libre partage, concrétisée par le projet de Stallman, découlait d’une organisation et d’une éthique originale, développée au sein d’une sous-culture en vogue dans le milieu informatique, qui fut documenté dans de nombreux ouvrages. Parmi ceux-ci se trouve « L’éthique hacker[1] », un livre remarquable, dans lequel le philosophe finlandais Pekka Himanen, analyse en détails les origines de la culture hacker », apparue au début des années 1950. Un simple extrait de la quatrième de couverture de cet ouvrage[2] permet de mieux comprendre la manière de penser de ce groupe d’informaticiens, qui fut rejoint par le créateur du premier logiciel libre durant ses études universitaires, pour en devenir, par la suite, l’une des figures les plus charismatiques :

On considérait jusqu’à présent le « hacker » comme un voyou d’Internet, responsable d’actes de piratage et de vols de numéros de cartes bancaires. Le philosophe Pekka Himanen voit au contraire les hackers comme des citoyens modèles de l’ère de l’information. Il les considère comme les véritables moteurs d’une profonde mutation sociale. Leur éthique, leur rapport au travail, au temps ou à l’argent, sont fondés sur la passion, le plaisir ou le partage. Cette éthique est radicalement opposée à l’éthique protestante, telle qu’elle est définie par Max Weber, du travail comme devoir, comme valeur en soi, une morale qui domine encore le monde aujourd’hui.

Cette citation nous aide à comprendre plus facilement les origines de Wikipédia et des nombreux projets frères apparus tout, avant la naissance de ce que l’on nomme aujourd’hui le mouvement Wikimédia. Un mouvement apparu au cœur de la révolution numérique, dans le contexte d’une transition culturelle dont l’un des aspects fondamentaux est sans nul doute : la concrétisation d’une utopie opposée à ce que Karl Polaniy[3] décrivait déjà, en 1944, comme un libéralisme économique, qui « subordonne les objectifs humains à la logique d’un mécanisme de marché impersonnel[4] ».

  1. Pekka Himanen, The Hacker Ethic and the Spirit of the Information Age, Vintage, (ISBN 978-0-09-942692-9).
  2. Pekka Himanen, L'éthique hacker et l'esprit de l'ère de l'information, Exils, (ISBN 2-912969-29-8 et 978-2-912969-29-3, OCLC 51085264).
  3. Karl Polanyi, Fred Block et Joseph E Stiglitz, The great transformation: the political and economic origins of our time, Beacon press, (ISBN 978-0-8070-5643-1, OCLC 1277370048).
  4. Texte original avant sa traduction par www.deepl.com/translator : « subordinates human purposes to the logic of an impersonal market mechanism ».